Les États membres de l’ONU adoptent 17 Objectifs de développement durable pour les 15 prochaines années. Des engagements « historiques », mais les ONG attendent des pas plus concrets. État des lieux.
C’est vendredi 25 septembre que l’Assemblée générale de l’ONU doit formellement adopter son « Programme de développement durable à l’horizon 2030 ». Autrement dit, 17 Objectifs de développement durable (ODD), pour les 15 prochaines années, pour prendre la suite des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) qui couraient sur la période 2000-2015.
Ces 17 ODD (ou Global Goals en anglais) se déclinent en 169 cibles. Un format bien plus large que les 8 OMD et leurs 21 cibles. Une portée plus large aussi. Ils intègrent par exemple la lutte contre le changement climatique et la protection de l’environnement.
Si les OMD ciblaient essentiellement les pays les plus pauvres, les ODD sont censés s’appliquer à l’ensemble des pays du monde. L’Objectif 10, par exemple, vise à « réduire les inégalités entre les pays et en leur sein ». L’égalité entre les sexes est au cœur de l’Objectif 5, mais des questions relatives aux droits des femmes se retrouvent également au sein d’autres objectifs.
Voir aussi : L’ONU valide ses 17 Objectifs de développement
L’adoption de ces ODD est le point d’orgue d’un sommet sur le développement durable qui se poursuit au siège de l’ONU jusqu’au 27 septembre, en grandes pompes, en présence de 150 dirigeants mondiaux et de plusieurs personnalités, comme la prix Nobel de la paix 2014 Malala Yousafzai qui lancera un nouvel appel à l’action en faveur de l’éducation des filles.
Reste une question : ces objectifs sont-ils tenables ? Alors que les OMD ont abouti à un bilan mitigé, la réponse n’est pas évidente. Les ONG, qui ont participé au long processus de concertation pour aboutir à ces ODD, restent vigilantes.
« Sortir du statu quo »
Ces nouveaux objectifs « sont ambitieux et pourraient avoir une portée historique », salue Winnie Byanyima, directrice générale d’Oxfam International. Mais à condition de « sortir du statu quo. Les pays, riches et pauvres, doivent braver les puissants groupes d’intérêts qui cherchent à maintenir l’état actuel des choses, au détriment de la population et de la planète. »
En France, ATD Quart Monde salue également des « avancées historiques », mais déplore aussi « des rendez-vous ratés », comme le fait que ces ODD ne mentionnent pas la nécessité de réformes fiscales pour atteindre plus d’équité de revenus entre les pays et entre personnes ». Pour Oxfam aussi, « il faut redéfinir les règles des systèmes financiers nationaux et internationaux, notamment mettre un frein aux pratiques d’optimisation fiscale des multinationales et prendre des mesures assurant que les grandes fortunes contribuent plus équitablement à la société. »
Assurer un suivi
Le CCFD-Terre Solidaire, de même, « se félicite de l’adoption d’objectifs universels, applicables à tous ». Le fait que tous les pays, même les plus riches, aient à décliner leurs objectifs « amènera une mobilisation à tous les niveaux ». Mais l’ONG met en avant cet autre bémol, majeur : ces objectifs ne sont en rien contraignants. « Comment garantir alors que les plans d’action nationaux comprendront des engagements mesurables et des échéances ? », s’interroge Caroline Dorémus-Mège, directrice du plaidoyer au CCFD-Terre Solidaire.
D’autant qu’à ce jour, la définition des indicateurs de suivi et d’évaluation n’est pas aboutie, souligne l’ONG. C’est aussi ce que déplore ATD Quart Monde, qui « veut aller plus loin en s’engageant au niveau international dans l’élaboration d’indicateurs et, dans chaque pays, dans la mise en œuvre et l’évaluation de ces Objectifs de Développement Durable. » Ces indicateurs devraient toutefois être adoptés dans les mois qui viennent.
L’éternelle question des financements
Autre question, celle des moyens : aujourd’hui, la plupart des pays riches n’honorent pas ou partiellement leurs promesses d’aide au développement. La France, par exemple, n’y consacre que 0,36% de son RNB, au lieu de l’engagement de 0,7%, et cette part ne cesse de reculer depuis 2010.
« Après les résultats décevants de la conférence sur le Financement du développement d’Addis Abeba en juillet dernier, il semble évident que les moyens ne seront pas à la hauteur des enjeux », conclut Caroline Dorémus-Mège, du CCFD-Terre Solidaire. Une conférence qui avait en effet laissé les ONG sur leur faim, notamment en raison de la place trop importante accordée au secteur privé.
Voir : Financement du développement : accord « historique »… ou « échec »
Et c’est encore une critique qui revient face aux ODD. « Le document final ne remédie pas au poids excessif du secteur privé dans la fourniture de biens et services de base », souligne ainsi ATD Quart-Monde.