En 2009, en France, la réticence à l’égard de l’islam était plus fréquente chez les hommes ; elle l’est désormais plus chez les femmes. C’est l’un des constats de la CNCDH dans son rapport 2012 sur le racisme.
Dans son rapport 2012 sur le racisme en France, publié jeudi 21 mars, la Commission nationale consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) s’inquiète d’une « montée de l’intolérance », d’une « crispation » à l’égard de l’immigration. La CNCDH s’appuie sur son baromètre annuel réalisé par l’institut CSA (1), dans lequel quasiment tous les indicateurs de xénophobie sont en hausse. Parfois très forte.
Ainsi, 69% des personnes interrogées estiment qu’« il y a trop d’immigrés aujourd’hui en France », une progression de 10 points par rapport à 2011 et de 22 points par rapport à 2009. Ils sont par ailleurs 61 % à considérer qu’« aujourd’hui en France on ne se sent plus chez soi comme avant » (+ 6% en un an), « soit la proportion la plus élevée depuis 1990 ». Un sentiment de peur alimenté par le fantasme, puisque cette impression est « d’autant plus répandue que le taux d’étrangers dans la population résidant dans la commune est faible », souligne la CNCDH.
Déjà, dans son rapport 2009, la commission s’inquétait d’une banalisation du racisme et des risques d’amplification de haine que fait peser la crise économique (Voir : Racisme en France, l’inquiétant « revirement de tendance »).
« L’idée que l’islam remet en cause les droits des femmes est de plus en plus présente dans le débat public »
Aujourd’hui, ce sont deux groupes qui cristallisent tout particulièrement les attitudes racistes : les Roms migrants et les musulmans. « On pourrait dire qu’aujourd’hui le musulman, suivi de près par le maghrébin, a remplacé le juif dans les représentations et la construction d’un bouc émissaire », souligne le rapport. Face à ces constats alarmistes, la CNCDH ne tire pas, toutefois, de conclusion définitive : « Reste à déterminer si cela constitue une véritable tendance de fond ou s’il ne s’agit finalement que d’une chambre d’écho du débat qui a animé une partie de la campagne présidentielle de 2012 », écrit-elle.
Le rapport note par ailleurs une spécificité de « l’aversion à l’islam » et de son évolution. « En 2009 la réticence à l’égard de l’islam était plus fréquente chez les hommes, en 2012 elle progresse fortement (17 points) chez les femmes, qui devancent maintenant les hommes de 8 points. »
Cette tendance reste aussi à confirmer, note la CNCDH, mais « l’idée que l’islam remet en cause les droits des femmes est de plus en plus présente dans le débat public, de la droite à la gauche de l’échiquier politique, et pourrait expliquer ce retournement. ». Cette « forte réticence envers l’islam et ses pratiques » a également connu une progression vertigineuse (+22 points) chez les personnes les plus diplômées, pourtant « généralement les plus tolérantes. »
(1) Sondage en face à face, du 6 au 12 décembre 2012, auprès d’un échantillon de 1029 personnes âgées de dix-huit ans et plus résidant en France, constitué d’après la méthode des quotas (sexe, âge, profession du chef de ménage), après stratification par région et catégorie d’agglomération.