Le plan « Stop à la dette » présenté par le Premier ministre veut réaliser 43,8 milliards d’euros d’économies d’ici 2026. Un projet d’austérité dont les mesures sont lourdement critiquées par les associations féministes. Les femmes en sont toujours les premières victimes…

« Année blanche » en termes de prestations sociales, coupes budgétaires pour la santé, suppression de jours fériés, non-remplacement des fonctionnaires au moment de leur retraite : voilà entre autres ce que François Bayrou a présenté pour son plan de désendettement, un avant-goût du budget 2026 pour la France. Cette annonce a immédiatement provoqué une levée de boucliers, notamment de la part d’associations féministes. Les militant·e·s s’indignent de voir les plus vulnérables une nouvelle fois pris·e·s pour cibles.
Les femmes sont les plus touchées par les plans d’austérité…
« Ces mesures sont vouées à affecter en particulier les femmes, surreprésentées parmi les allocataires des minimas sociaux, les mères isolées, les retraité·es à faible pension, elles aussi plus nombreuses, les personnes en affection longue durée et les usagères des services publics », écrivait l’association Osez le féminisme ! dans son communiqué de presse du 28 juillet. Un constat bien volontiers relayé par d’autres associations et militant·e·s féministes.
Pour Laurence Rossignol et Céline Thiébault-Martinez, respectivement sénatrice et députée socialistes, les mesures annoncées ignorent encore la pauvreté des femmes. « Elles sont 56 % des bénéficiaires du minimum vieillesse; déjà elles ne parviennent pas à vivre dans des conditions dignes. […] Le gel du RSA et des APL serait un coup dur pour les mères monoparentales et leurs enfants dont la pauvreté a déjà bondi de 3,9 points », expliquent-elles dans un communiqué de presse.
La Fédération nationale des Centres d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF) ajoute sur son site : « Alors qu’en 2020 le RSA bénéficiait à 2,32 millions de personnes, 54 % de ses bénéficiaires étaient des femmes. Elles représentent même 96 % des allocataires du RSA majoré ».
Alors que l’Insee fait état d’une hausse considérable de la pauvreté en France, « voilà comment se conclurait la grande cause Égalité femmes-hommes du quinquennat : un nombre accru de femmes et d’enfants pauvres », déplorent Laurence Rossignol et Céline Thiébault-Martinez. Une pauvreté qui touche particulièrement les familles monoparentales (300 000 sont concernées), dont 8 sur 10 sont « composées d’une femme élevant seule au moins un enfant » selon les CIDFF.
Au mois de juin, le Planning familial s’inquiétait déjà dans une tribune publiée dans Le Monde des conséquences néfastes que pourrait avoir de telles politiques conservatrices sur les plus vulnérables ; notamment les femmes mais également « les personnes LGBTQIA+, les personnes migrantes, les jeunes et les plus précaires ».
En outre, les réductions d’effectif dans la fonction publique concernent toujours en premier lieu les femmes. En 2012, l’Organisation internationale du travail (OIT) soulignait que « les réductions de postes et de salaires dans le secteur public et dans les services, où les femmes sont majoritaires, toucheront essentiellement les femmes ». Cette année là, lors de manifestations contre le Pacte budgétaire européen, le collectif Stop austérité faisait défiler des femmes en première ligne : une façon de souligner qu’elles en seraient les premières victimes, mais aussi « les premières et les plus ardentes à la combattre » (lire aussi : Mobilisation au féminin contre le traité d’austérité).
…Alors que les associations peinent déjà à leur venir en aide
Avant même l’annonce de ce plan de désendettement, de nombreuses associations ont interpellé le Premier ministre au sujet de « coupes budgétaires qui mettent les femmes en danger ». Malgré une pétition en ligne soutenue par plus de 90 associations et 14 000 signataires, François Bayrou ne semble pas avoir été réceptif à leur volonté de ne pas voir « les femmes sacrifiées sur l’autel de l’austérité ».
Lire aussi : Le Planning familial lance une nouvelle alerte sur le financement des associations féministes
Dans son communiqué de presse, Osez le féminisme ! rappelle que les moyens alloués à la grande cause du quinquennat sont déjà largement insuffisants : « Un rapport de la Fondation des Femmes évalue les besoins réels entre 2,6 et 5,4 milliards d’euros par an. L’État y consacre actuellement 184 millions, soit… 0,04 % de son budget… ». Pourtant, les besoins existent bel et bien. « Chaque jour, le 3919 [Violences Femmes Info] reçoit plus de 300 appels à l’aide des femmes victimes de violences, et un homme commet un féminicide tous les trois jours environ », souligne l’association.
Plan Cash, « plateforme d’éducation financière dédiée aux femmes et à leurs alliés », s’inquiète par ailleurs de la suppression, envisagée un temps par François Bayrou, de plusieurs niches fiscales, notamment « celle pour les aides à domicile, le personnel de ménage et les dons aux associations ». Si cette mesure est toujours en préparation, elle pourrait avoir un effet déplorable sur les activités des associations, déjà « asphyxiées par le manque de moyens » désespère Osez le féminisme !.
En juin, face aux retards de versement de subventions, la directrice générale de la Fédération nationale des CIDFF Clémence Pajot expliquait déjà : « La seule raison qui nous a été donnée, c’est le gel des crédits nécessaire pour faire des économies » (lire aussi : « Les CIDFF existent depuis 50 ans et on a jamais été confronté à une telle dégradation financière », alerte Clémence Pajot). En revanche, les aides publiques aux entreprises ne semblent pas être impactées. Un rapport sénatorial dévoilait récemment les 211 milliards d’euros d’aides publiques versées aux entreprises sans évoquer l’aspect genré de ces aides.
Lire : 211 milliards d’euros d’aides publiques aux entreprises : un pactole masculin
En maintenant les aides publiques aux entreprises et en diminuant les dépenses sociales, le plan du Premier ministre devrait, sans le dire ouvertement, faire des économies sur le dos et au détriment des femmes, plus souvent vulnérables et déjà confrontées à de nombreuses inégalités qui sont bien loin de se résorber.