
Capture d’écran du spot de la campagne « Reconnaissons le féminicide ! »
Une campagne pour que le féminicide, le meurtre d’une femme parce qu’elle est une femme, soit défini dans la loi, et pour que les médias cessent de considérer comme un fait divers ce qui est un fait de société.
« Reconnaissons le féminicide ! » C’est la dernière campagne lancée par l’association Osez le Féminisme, pour la prise en compte du « féminicide », en tant que meurtre d’une femme parce qu’elle est une femme. Cette notion est entrée dans les lois de plusieurs pays sud-américains (Voir par exemple : En Équateur aussi le féminicide devient un crime), le terme a aussi fait son entrée dans le Petit Robert en 2014, défini comme “Meurtre d’une femme, d’une fille, en raison de son sexe”.
Bien que récente, la lutte d’associations pour la reconnaissance pénale du féminicide n’est pas nouvelle. Les Nouvelles NEWS l’évoquaient par exemple en 2011 (Voir : Féminicide, l’essor d’un nouveau concept). « Dans la loi française, un crime raciste peut-être jugé comme tel, un crime antisémite peut-être condamné comme tel. Mais un crime machiste, ça n’existe pas. Pourtant, reconnaître cela dans la loi, c’est se donner les moyens de le combattre », souligne Osez le Féminisme.
Dans une résolution adoptée en 2009, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe demandait à ses Etats membres de « réfléchir à l’introduction de circonstances aggravantes dans les lois pénales lorsque les femmes victimes ont subi des violences ou ont été tuées en raison de leur sexe. »
La secrétaire d’Etat aux Droits des femmes s’est elle-même exprimée sur la notion de féminicide dans un tweet le 23 octobre dernier.
Pour autant, il n’est « pas réalisable aujourd’hui de modifier le code pénal pour y inclure la notion de féminicide », estime Pascale Boistard. L’Espagne et l’Italie, pris comme exemple pour leur prise en compte de la notion de féminicide, ne vont d’ailleurs pas plus loin que la France dans leurs lois. Dans ces pays aussi, c’est seulement quand le meurtre est commis au sein du couple, où quand la victime est enceinte, que le code pénal prévoit une circonstance aggravante.
« Débat culturel »
Il faut d’abord que la société – les associations, les journalistes, les parlementaires – s’approprie le mot », estime Pascale Boistard. « On constate par exemple dans les médias que les meurtres de femmes restent des faits divers parmi d’autres. Or, il faut que ces violences soient prises en compte comme des violences spécifiques, et qu’on ouvre ce débat culturel »,
La campagne d’Osez le féminisme vise d’ailleurs aussi les médias qui trop souvent qualifient les meurtres de femmes de « crimes passionnels » ou « drames familiaux », les classant dans la rubrique « faits divers » alors qu’il s’agit de questions de société, souligne l’association. Un constat que dressent régulièrement Les Nouvelles NEWS (Voir notamment : L’immunité amoureuse dans la presse).
Au printemps dernier, la conférence des écoles de journalisme s’était opposée à ce que la loi leur impose un enseignement à l’égalité entre les femmes et les hommes – et avait obtenu gain de cause.