Dans Put your soul on your hand and walk, une cinéaste iranienne filme ses conversations avec une jeune photographe palestinienne de Gaza, tuée le 16 avril dernier.

Les paillettes du Festival de Cannes semblent indécentes alors que Gaza est bombardée sans relâche par Israël. Dans une Tribune publiée dans Libération le 12 mai dernier, près de 400 grands noms du cinéma mondial ont déclaré : « Nous ne pouvons rester silencieux.se.s tandis qu’un génocide est en cours à Gaza ». Lors de la soirée d’ouverture, la présidente du jury Juliette Binoche a récité quelques phrases d’un poème de Fatma Hassona, jeune palestinienne morte sous les bombes le 16 avril dernier, avec toute sa famille.
Fatma est l’héroïne d’un documentaire projeté à Cannes à l’Acid, une programmation menée par un collectif de cinéastes, moins médiatique que les autres sélections. Sepideh Farsi, documentariste iranienne exilée, a contacté Fatma Hassona par un ami commun et filmé leurs conversations téléphoniques, qui commencent en avril 2024 et ont continué pendant 200 jours malgré les bombes, le manque de nourriture, les coupures d’électricité et les problèmes de connexion. Fatma, qui a 24 ans, l’âge de la fille de la réalisatrice, c’est d’abord un immense sourire en étendard. Et un immense courage : la phrase titre du film (littéralement, « Pose ton âme sur ta main et marche ») est le mantra de la jeune fille quand elle sort dans les ruines prendre des photos malgré les snipers.
Une relation de confiance et d’amitié s’est tissée au fil des jours. Le fossé est immense entre la vie de Fatma et celle de Sepideh Farsi, qui appelle de France, d’Italie ou du Canada au gré de ses voyages pour accompagner un de ses films en festivals. Quand parfois la cinéaste ne sait plus quoi dire, son impuissance nous renvoie à la nôtre. Il ne reste que le témoignage. « Elle m’a prêté ses yeux pour voir Gaza où elle résistait en documentant la guerre, et moi, je suis devenue un lien entre elle et le reste du monde, depuis sa « prison de Gaza » comme elle le disait » raconte Sepideh Farsi. La jeune femme est morte quelques jours après l’annonce de la sélection du film à Cannes, il lui est dédié ainsi qu’à sa famille. Ses photos des habitants de Gaza, seules tâches de couleurs dans les ruines, ses poèmes qui évoquent la mort et le bonheur perdu, sont autant de témoignages artistiques qui resteront.

« Put your hand on your soul and walk » de Sepideh Farsi, (documentaire, France, Palestine, Iran, 110 minutes), avec Fatma Hassona. Produit par Rêves d’eau production, distribué par New Story. Sélection Acid Cannes 2025. Date de sortie inconnue