On ne compte pas les titres de presse qui ont tiré d’une simple image des conclusions sur la « jalousie » de Michelle Obama. Extrapolations que l’auteur de la photo réduit à néant.
Que d’exégèses pour une simple photo. L’image prise par un photographe de l’AFP lors de la cérémonie d’hommage à Nelson, mardi 10 décembre dans le stade de Soweto, a provoqué une avalanche de commentaires et d’articles de presse.
La première ministre danoise, Helle Thorning-Schmidt se prend en photo avec son homologue britannique David Cameron et le président des États-Unis, tandis qu’à côté l’épouse de Barack Obama, Michelle, reste de marbre. Et semble même consternée.
Il n’en fallait pas plus plus que tout un chacun se sente habilité à interpréter et commenter l’image. Parce qu’il s’agit d’un « selfie » et que le mot est à la mode depuis quelques semaines. Mais aussi parce que c’est l’occasion de broder autour de la supposée jalousie féminine, ce dont raffole la presse et l’édition (Voir : Les éditeurs attisent le marché de la rivalité féminine et Le poison de la misogynie). Le correspondant de BFM Business et BFMTV à New York commentait ainsi :
Miam, « de l’eau dans le gaz »
Si les réseaux sociaux se sont emparés de l’image, les articles de presse sur la « jalousie » supposée de Michelle Obama n’ont pas tardé à suivre. Pour Atlantico , par exemple, il y a « de l’eau dans le gaz au sein du couple » (et on notera ce surtitre distingué : « Tu dors sur le canapé »). Metronews se permet d’anticiper : « Bonjour l’ambiance dans l’avion du retour… ». Le NouvelObs s’interroge : « Obama, le selfie de la discorde ? » Et pour RTL.be, « Barack Obama a évité la catastrophe conjugale ! ». On pourrait poursuivre cette liste presque à l’infini.
Quand la presse sérieuse flirte avec le commentaire people, les sites plus légers vont évidemment plus loin encore. Pour le Journal des Femmes, voilà « un couple en crise », car « notre jalouse First Lady sort les griffes dès qu’une inconnue s’approche un peu trop près de son petit mari ! »
Photographe attristé
Et pourtant… l’auteur de la photo, Roberto Schmidt, fournit mercredi 11 décembre sur le site « making-of » de l’AFP ses explications sur le contexte dans lequel il a saisi cette image « « qui a fait le tour du monde ».
Première mise au point : alors que nombre de commentateurs se sont indignés ou gaussé de l’attitude désinvolte des chefs d’État – s’amuser ainsi lors d’une cérémonie d’hommage funèbre – le photographe souligne qu’elle n’avait rien d’indigne : à ce moment-là, « l’atmosphère est à la fête, pas au recueillement morbide ».
Quant à l’attitude « contrariée » de Michelle Obama, elle « n’est que le pur fruit du hasard ». Car « en réalité, quelques secondes plus tôt, la Première dame des États-Unis riait et plaisantait elle aussi avec tous ceux qui l’entouraient, Cameron et Schmidt compris. »
Pour le coup, c’est le photographe qui se retrouve contrarié des répercussions qu’a eue cette image. Et de conclure : « cela me rend un peu triste sur la façon que nous avons de nous égarer sur les aspects les plus triviaux du quotidien, au lieu de voir les choses essentielles. »
Cette interprétation « cliché » rappelle un buzz fait sur une photo prise lors du G8 en Italie en 2009. L’instantané disait le contraire de ce qui s’était réellement passé. Eclats de rires sur la chaîne ABC news qui montrait la scène en entier.