À l’occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, un projet de loi est annoncé par Aurore Bergé. Mais la question du budget et le calendrier restent flous.
Une loi intégrale contre les violences sexistes et sexuelles est-elle sur le point de voir le jour ? C’est ce que laissent espérer les déclarations de la ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé, à l’occasion journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes le 25 novembre. Mais encore faut-il que des actions concrètes suivent…
Vers une loi intégrale
Le 25 novembre encore, quatre femmes ont été tuées par leurs conjoints ou ex-conjoints en France. C’est la réalité en 2025 : toutes les sept heures, il y a une femme que son conjoint ou ex-conjoint tue, tente de tuer, conduit à se suicider ou à tenter de se suicider, comme l’évalue la lettre annuelle de l’Observatoire des violences faites aux femmes.
Lire : « Les VSS en hausse : l’alerte de l’Observatoire des violences faites aux femmes«
Depuis 2024, une coalition féministe réclame une loi intégrale pour lutter contre le fléau des violences sexistes et sexuelles, omniprésentes dans la société. Cette coalition a élaboré 140 propositions pour véritablement avancer.
Sans cesse mis de côté par les gouvernements successifs, ce projet de loi intégrale semble enfin être envisagé. Le 24 novembre 2025, Aurore Bergé a annoncé un projet de loi-cadre contre les violences sur les femmes et les enfants, composé de 53 mesures allant de l’accès à l’aide juridictionnelle dès le dépôt de plainte à un socle obligatoire d’actes d’enquêtes, en passant par un classement sans suite systématiquement motivé ainsi que l’imprescriptibilité du crime d’inceste. L’objectif ? « Mieux former, mieux détecter, mieux prévenir et mieux sanctionner », indique la ministre à l’AFP.
« Il faut que les bourreaux aient peur (…) Aujourd’hui ils n’ont pas peur, parce que la prescription les protège, parce que l’angoisse du dépôt de plainte les protège, parce que l’angoisse de la confrontation les protège, parce que l’angoisse de la durée aussi du traitement judiciaire les protège. Il faut que ce soit eux qui aient peur, il faut qu’ils aient conscience que les victimes, à tout instant, pourront avoir accès à la justice », insiste la ministre. Elle poursuit : « Le dépôt de plainte est le premier défi. On a beaucoup de témoignages de victimes qui ont réussi à porter plainte, mais qui disent qu’elles sont sorties broyées par le traitement judiciaire qui leur a été réservé ».
La ministre met aussi l’accent sur la protection des enfants. « Il faut une tolérance zéro. Il faut étendre à tous les professionnels au contact des enfants et quel que soit leur statut, qu’ils soient fonctionnaires, vacataires, stagiaires, contractuels, intérimaires, le contrôle de leur casier judiciaire », martèle-t-elle. Les mesures annoncées répondent aux revendications des associations féministes.
Un jour de visibilité… mais des violences toute l’année
Mais le timing interroge. Quelques heures avant l’annonce du projet de loi-cadre d’Aurore Bergé, une proposition de loi intégrale, soutenue par 110 députés de différents bords politiques, avait déjà été déposée par la députée socialiste Céline Thiébault-Martinez. À la différence du projet d’Aurore Bergé, cette proposition compte 78 mesures allant du domaine de la justice à la police, en passant par la protection des enfants, la santé, le travail ou encore la lutte contre les cyberviolences. Céline Thiébault-Martinez précise que « ses deux initiatives étaient totalement complémentaires et pas en concurrence ».
Que les initiatives politiques se multiplient pour lutter contre les VSS est nécessaire. La Fondation des femmes « salue ce calendrier qui montre les volontés concordantes du parlement et du gouvernement. Ces deux initiatives en parallèle donnent l’espoir que les choses avancent vite. Sur le fond, elles vont toutes les deux dans le bon sens, déclare Laura Slimani, directrice de projets au sein de l’association, interrogée par le journal L’Humanité, et ajoute : Mais l’interrogation se pose sur les moyens alloués ».
Un budget incertain
Pour le moment, le projet de loi annoncé par Aurore Bergé n’a toujours pas été rédigé. Il n’a pas non plus été budgété. « On a beaucoup de mesures aujourd’hui qui peuvent être déployées immédiatement sans moyens budgétaires supplémentaires », a déclaré la ministre. Or, les associations féministes sont nombreuses à alerter quant à la diminution de leurs moyens et, par conséquent, la dégradation des actions et des services qu’elles proposent. Donner les moyens à ces associations permet d’agir directement sur le terrain, dans les meilleures conditions, auprès des victimes de violences.
Au début de l’année 2025, Aurore Bergé se félicitait de l’augmentation du budget égalité. Or, cette hausse restait largement insuffisante pour éradiquer les violences sexistes et sexuelles. La députée Céline Thiébault-Martinez estime un budget d’« au minimum 3 milliards d’euros pour financer les mesures ». Si la ministre souhaite que son projet de loi-cadre soit inscrit à l’ordre du jour parlementaire « dès que cela sera possible », le contexte incertain du budget de 2026 brouille la visibilité.
Ce mercredi 26 novembre au Sénat, Laurence Rossignol à interpelé le Premier ministre pour qu’il mobilise l’ensemble du gouvernement et en particulier les ministres de l’Education nationale, la Justice, l’Intérieur, la Sante, le Budget. Que Sébastien Lecornu soit personnellement engagé pour que la loi intégrale aboutisse, qu’il donne une date pour adopter le projet de loi en Conseil des ministres, et une pour l’inscrire à l’ordre du jour du Parlement.
C’est Aurore Bergé qui lui a répondu que la rédaction du projet de loi était en cours : « C’est le travail que nous ferons dès le premier semestre avec le Premier ministre »… sans pouvoir s’engager sur un calendrier plus précis.
À lire dans LesNouvellesNews.fr :
LES VSS EN HAUSSE : L’ALERTE DE L’OBSERVATOIRE NATIONAL DES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES
LOI INTÉGRALE CONTRE LES VIOLENCES SEXUELLES CHERCHE VOLONTÉ POLITIQUE
VIOLENCES SEXUELLES : LES ANNONCES DE MICHEL BARNIER TRÈS LOIN D’UNE LOI INTÉGRALE
FÉMINICIDES SOUS-ÉVALUÉS ? DES MORTES CACHÉES PAR DES LOIS FLOUES
3 JANVIER, 3 FÉMINICIDES. PARLONS DE « VIOLENCES MACHISTES » POUR COMBATTRE CE FLÉAU !
LE PLANNING FAMILIAL LANCE UNE NOUVELLE ALERTE SUR LE FINANCEMENT DES ASSOCIATIONS FÉMINISTES
POUR LUTTER CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES, L’ARGENT MANQUE CRUELLEMENT

