Une résolution à l’Assemblée, et un futur plan annoncé par Marisol Touraine. Présentée comme un « droit fondamental », mais sans l’être juridiquement, l’interruption volontaire de grossesse n’est toujours pas normalisée.
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Mercredi 26 novembre 2014, cela fera 40 ans que Simone Veil ouvrait les débats parlementaires à l’issue desquels la France reconnaissait l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Pour cet anniversaire, l’Assemblée nationale se prononcera sur une proposition de de résolution « visant à réaffirmer le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse en France et en Europe ».
Le texte, proposé par Catherine Coutelle (présidente PS de la délégation aux Droits des femmes) et signé par la quasi-totalité des députés (du PCF à l’UMP),
« Réaffirme l’importance du droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse pour toutes les femmes, en France, en Europe et dans le monde ;
Rappelle que le droit universel des femmes à disposer librement de leur corps est une condition indispensable pour la construction de l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, et d’une société de progrès ;
Affirme le rôle majeur de la prévention, et de l’éducation à la sexualité, en direction des jeunes ;
Affirme la nécessité de garantir l’accès des femmes à une information de qualité, à une contraception adaptée, et à l’avortement sûr et légal ;
Souhaite que la France poursuive son engagement au niveau européen, comme international, en faveur d’un accès universel à la planification familiale. »
Quarante ans après, souligne l’exposé des motifs du texte, « le droit à l’avortement, souvent contesté, reste fragile ». Pour preuve : les réseaux anti-avortement liés à l’extrême-droite catholique n’ont pas manqué de s’offusquer du texte et de faire pression sur les députés, ces derniers jours. L’objet de leur croisade ? La notion de « droit fondamental » qui y est associée à l’IVG, et qui s’oppose, selon leur argumentaire, à celle de « respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ».
Un « droit » sans valeur juridique et sans garantie
Ce qui vient soulever une remarque : de fait, l’IVG n’est pas considérée expressément comme un « droit » dans les textes juridiques en France. Et cette résolution, qui n’a qu’une valeur symbolique, ne viendra en rien consacrer les droits reproductifs comme des « droits fondamentaux ».
> Voir notre entretien avec Diane Roman : « En France, l’IVG n’est toujours pas consacrée comme un droit »
L’accès à l’IVG n’est d’ailleurs pas garanti. Au point que Marisol Touraine, la ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, vient d’annoncer dans le magazine Elle qu’elle présentera début janvier un plan « pour améliorer l’accès à l’IVG sur l’ensemble du territoire ». Ces 10 dernières années, plus de 130 établissement de santé pratiquant des IVG ont fermé leurs portes, alors que la demande est restée stable. Au point que plusieurs centaines de femmes doivent aller avorter à l’étranger, comme le dénonçaient déjà des associations en 2011. La ministre juge par ailleurs « inacceptable » que certains médecins refusent de pratiquer l’avortement au-delà de la dixième semaine, au mépris de la loi.
Il y a un an, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE/fh) réclamait un moratoire sur les fermetures, et un rappel à la loi pour les établissements qui refusent de pratiquer des IVG entre 10 et 12 semaines de grossesse.
Pour « normaliser » l’avortement, le HCE/fh appelait également à supprimer du Code de la santé publique la notion de détresse associée à l’IVG et la mention de la « clause de conscience » accordée aux médecins. La notion de détresse a été supprimée, non sans débats, dans le cadre de la loi pour l’égalité. En revanche, le gouvernement avait renoncé à remettre en cause la clause de conscience, pour éviter des « crispations ».

