L’ouverture de la Semaine de la critique nous offre une bonne raison de nous réjouir aujourd’hui : « L’intérêt d’Adam » de Laura Wandel est un film de réalisatrice et d’actrices bluffant.

Passons un instant dans un hôpital public, aux côtés d’une infirmière chef de service pédiatrique, campée par Léa Drucker. Pendant une heure et 13 minutes, il lui est impossible de souffler, au service des autres et surtout des enfants. Débordée et pourtant toujours calme, elle trouve le temps de prendre en charge Adam, 4 ans, hospitalisé pour malnutrition. A la suite d’une décision de justice, la mère d’Adam, Rebecca, ne peut rester que quelques heures par jour avec lui. Mais elle se refuse à quitter son fils. Dans l’intérêt de l’enfant, Lucy fera tout pour venir en aide à cette femme qui ne veut pas reconnaitre sa propre détresse (Anamaria Vartolomei, héroïne de « L’Evenement » d’Audrey Diwan).
Déjà avec « Un monde », primé à Un Certain Regard en 2021 (par le jury Fipresci), Laura Wandel mettait en scène des enfants avec un talent certain : un frère et une sœur dans une cour de récréation, le harcèlement, des adultes aveugles ou indifférents. Elle signait un portrait sans concession d’une institution dépassée, l’école. Là encore, à l’hôpital, rien n’est simple. D’autant que le personnel médical n’est pas d’accord sur la marche à suivre face à une mère isolée, persuadée d’être la seule capable de sauver son enfant. De la confiance entre l’infirmière et la jeune mère butée dépend le sort d’Adam. Malgré l’état d’urgence du monde médical, qui manque de tout, malgré la violence du monde qui réussit à entrer dans ce refuge provisoire qu’est l’hôpital, une femme réussira-t-elle à sauver une autre femme ? Tout en tension, avec sa mise en scène épurée, « L’intérêt d’Adam » est la réussite d’un trio : une cinéaste très douée et ses deux actrices remarquables, réunies pour la première fois.
« L’intérêt d’Adam » (fiction, Belgique France, 1h13), écrit et réalisé par Laura Wandel, avec Léa Drucker, Anamaria Vartolomei, produit par Les Films du Fleuve, Dragon Films et les Films de Pierre, distribué par Memento. En salles le 1er octobre 2025. Ouverture Semaine de la critique, Cannes 2025.

Laura Wandel dans la cour des grandes
Le cinéma de Laura Wandel a beaucoup des frères Dardenne : la foi dans le réalisme social, le talent de direction d’acteurs, une expérience de documentariste. Elle a étudié la réalisation à l’IAD de Louvain-la-Neuve où Jean Pierre Dardenne a appris l’art dramatique dans les années 70. Elle est produite par leur société les Films du Fleuve après son premier long métrage « Un Monde », qui recevra des récompenses au Festival de Cannes, au Festival BFI de Londres, et aux Magrittes du Cinéma belge. Cette jeune réalisatrice belge en a peut-être assez qu’on le lui rappelle, mais elle ne peut renier cette filiation avec ses deux grands frères de cinéma, doublement récompensés à Cannes (« Rosetta », puis « L’enfant « ) et en compétition cette année encore avec « Jeunes mères ». Mais la cinéaste a des qualités de mise en scène bien à elle : son attention aux acteurs et surtout aux enfants n’a d’égal que son art pour créer et maintenir la tension.