Depuis 2015, l’ONU dédie la journée du 19 juin à la lutte contre les violences sexuelles en temps de guerre et dresse un panorama de ces violences.
Viol et esclavage sexuel, prostitution, grossesse, avortement, stérilisation et mariage forcés, traite à des fins de violences ou d’exploitation sexuelles : ce sont les situations énumérées par l’ONU dans sa définition des violences sexuelles en temps de conflit.
Panorama
Peu de chiffres exacts existent pour mesurer l’étendue de ces violences en temps de guerre. L’ONU parvient à en obtenir chaque année par le biais de ses missions sur le terrain, mais rien ne permet de confirmer que toutes les victimes osent en parler. Pour les hommes, cette prise de parole est encore plus redoutée. « La croyance largement répandue selon laquelle les hommes doivent toujours paraître forts et ne jamais montrer de faiblesse intensifie leur souffrance lorsqu’ils se sentent incapables de correspondre à cette image », affirme Oleksiy Syvak, fondateur d’un réseau de soutien aux victimes masculines, au micro de l’AFP.
Le dernier rapport du Secrétaire général de l’ONU sur la violence sexuelle liée aux conflits pour l’année 2023 est effarant. En République démocratique du Congo, ce sont 733 cas documentés, dont 88 remontaient en fait aux années précédentes. En République centrafricaine, la MINUSCA (Mission multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation en Centrafrique) en comptabilisait 290 en 2023, soit une hausse de 51 % par rapport à l’année précédente. 221 cas au Soudan du Sud, 668 en Colombie, et 5 confirmés en Libye. Ce rapport fait aussi état d’un lien entre la prolifération d’armes et les violences sexuelles, puisqu’entre 70 % et 90 % des affaires recensées impliquaient l’usage d’armes légères et de petit calibre. En 2023, les déplacements internes et transfrontaliers, dont on sait qu’ils accroissent la vulnérabilité des populations civiles (notamment des femmes et des filles), ont également atteint des chiffres record.
Actions de l’ONU
Face à cette réalité alarmante, l’ONU tente de mettre sur pied des solutions pour venir en aide aux populations civiles. Des conseiller·ère·s pour la protection des femmes ont par exemple été déployé·e·s dans huit pays (sur plus de 20 pays couverts par le rapport du Secrétaire général), mais les ressources humaines et budgétaires nécessaires à la généralisation de ce projet font défaut. Un réseau interinstitutions, la Campagne des Nations Unies contre la violence sexuelle en temps de conflit, a également été créé pour financer des projets multisectoriels (au Congo, au Mali et en Ukraine par exemple). Ce réseau réunissait 25 « entités membres » en 2023. Enfin, des juristes spécialisées dans les questions de violences sexuelles ont également été envoyé·e·s sur le terrain pour apporter une assistance juridique aux organes judiciaires et policiers des pays concernés (Colombie, Ukraine, Guinée, Lybie, Congo, République centrafricaine, Soudan du Sud).
Avancées et coupes budgétaires
L’ONU relève quelques avancées significatives : l’ouverture d’un fonds de réparation pour les victimes au Congo, l’indemnisation de rescapées yézidies en Iraq, une journée nationale pour les victimes au Guatemala, la condamnation de l’ancien chef de faction Raïa Mutomboki pour crimes contre l’humanité pour grossesse forcée (une première mondiale !), l’ouverture de la « macro-affaire 11 » pour enquêter sur les violences sexuelles commises lors du conflit entre l’État colombien et le Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC)…
Pour autant, l’impunité reste la norme dans la plupart des cas. Selon l’ONU, plus de 70 % des parties épinglées pour non-respect de leurs engagements continuent de violer les normes établies par l’organisation depuis 5 ans ou plus. Dr Natalia Kanem, directrice exécutive du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA), a appelé à l’occasion de la Journée internationale du 19 juin à « maintenir la lumière pour les femmes et les filles ». « Malheureusement, alors que les conflits et la violence continuent de s’intensifier, les récentes coupes budgétaires mondiales ont anéanti les programmes de prévention et de lutte contre la violence sexiste. […] Des millions de femmes et de filles en subiront les conséquences », avertit-elle.
Reportage de l’ONU sur les violences sexuelles dans les conflits réalisé chez Les Rohingyas en 2018
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