85% des grandes entreprises ont déposé un plan en faveur de l’égalité professionnelle, comme la loi l’exige. Mais les PME, en manque de ressources humaines, sont encore à la traîne.
Elles sont 107. Cent sept entreprises qui n’ont pas établi d’accord ou de plan d’actions sur l’égalité professionnelle, et qui ont été sanctionnées pour cela depuis 2013.
La ministre des Droits des femmes Laurence Rossignol dévoilait ces chiffres lors de son audition mercredi 26 octobre par la Délégation aux Droits des Femmes de l’Assemblée nationale : « 11 000 accords et plans d’action sur l’égalité ont été déposés par les entreprises, 2 147 entreprises ont été mises en demeure, et 97 ont été sanctionnées financièrement ». Une petit erreur à l’oral sur le dernier nombre. Le ministère l’a précisé aux Nouvelles NEWS : le nombre d’entreprises sanctionnées se monte en fait à 107.
85% des grandes entreprises ont appliqué la loi
A contrario « le nombre d’accords et de plans d’action déposés progresse considérablement depuis janvier 2013 ». Selon le Ministère des Droits des femmes, 85% des grandes entreprises « sont désormais couvertes », tout comme 67% des entreprises de 300 à 999 salariés et 34% des entreprises de 50 à 299 salariés.
Depuis 2013, un décret oblige en effet les entreprises de plus de 50 salarié.e.s à déposer un plan d’action ou accord sur l’égalité professionnelle, et notamment sur l’égalité salariale, auprès des services de l’Etat (DIRRECTE). Un non-respect entraîne une mise en demeure de l’entreprise, puis une sanction pouvant aller jusqu’à une amende correspondant à 1% de sa masse salariale. Les toutes premières sanctions étaient tombées en avril 2013. En mars 2015, elles étaient 1 500 entreprises à avoir fait l’objet d’une mise en demeure et 48 à avoir dû payer une pénalité. Le nombre de ces dernières a donc plus que doublé depuis lors.
« Faire du name and pride : féliciter les entreprises pour leur progrès en matière d’égalité »
Reste une question régulièrement posée : faut-il dévoiler les noms des entreprises sanctionnées ? À propos des discriminations à l’embauche, la ministre du Travail Myriam El Khomri l’assurait en septembre : “Nous n’aurons aucun état d’âme à désigner les mauvais élèves”. Mais pour ce qui est des mauvais élèves de l’égalité professionnelle, le ministère des Droits des femmes refuse de divulguer les noms – entre autres parce que seule une partie des entreprises sont contrôlées, et nombre de hors-la-loi passent ainsi entre les mailles du filet. Mais ce silence ne plait pas à tout le monde.
« Je suis élu, je suis payé par le contribuable pour faire bon usage de l’argent public et je n’ai pas le droit de vérifier si l’entreprise avec qui je conclus un marché est respectueuse ou non du droit. Cela n’a pas de sens », estimait Julien Bayou, militant féministe. « Si on dévoile les noms, les entreprises feront plus d’efforts, c’est sûr. Certains appellent cela le name and shame [nommer pour faire honte] mais on pourrait aussi faire du name and pride c’est-à-dire féliciter les entreprises pour leur progrès en matière d’égalité. »
Le porte-parole d’EELV avait d’ailleurs déposé un recours en justice en 2015 pour que les noms des entreprises sanctionnées soient divulgués. Mais en avril 2016, le tribunal administratif de Paris rejetait sa requête. En cause, notamment, l’atteinte à la vie privée des entreprises en tant que personne « morale ». Les PME se plaignent, elles, de manquer de ressources humaines nécessaires pour élaborer ces rapports et plans d’action sur l’égalité. Elles devraient, avant la fin de l’année, pouvoir disposer d’un guide pratique pour les y aider. De fait, parmi les 107 entreprises sanctionnées, 73% sont des PME (entre 50 et 299 salariés), précise le Ministère. « L’objectif du gouvernement est d’accompagner les entreprises et plus particulièrement les PME, vers la conclusion d’un accord ».