La tuerie de Toronto commence à être qualifiée de « misogyne » contrairement à celle de Santa Barbara, en 2014. Mais pas de plan international de lutte contre le terrorisme misogyne à l’horizon.
Deux jours après, l’affaire ne prend plus que quelques secondes dans les journaux télévisés français. Aux premières heures suivant la tuerie de Toronto au Canada lundi 23 avril, les médias retenaient leur souffle. L’homme qui a tué 10 personnes et en a blessé 15 autres avec une camionnette était-il un terroriste ? A mesure que la crainte du terrorisme islamiste s’éloignait, l’affaire se dégonflait.
Mais cette fois-ci, une piste, autre que la santé mentale du tueur, Alek Minassian, est explorée par la police : « la piste misogyne» ainsi que le disent plusieurs journaux. Une piste qui, cependant, ne trouble pas les autorités outre mesure. Le ministre de la Sécurité publique canadien, Ralph Goodale, a en effet déclaré que « les événements qui sont survenus sont horribles, mais ils ne semblent pas être liés de quelconque façon à une menace pour la sécurité nationale » avant d’ajouter qu’ « aucune indication ne semble laisser croire qu’il faille changer le niveau de sécurité ».
Pas encore d’action en vue contre la criminalité misogyne. Pour l’instant, seul les mots changent et c’est déjà un petit progrès. En 2014 Elliot Rodger, étudiant de l’université californienne de Santa Barbara, tuait six personnes, et en blessait plus d’une dizaine, avant de se donner la mort. Il avait clairement et à plusieurs reprises affiché sa haine des femmes et annoncé son intention de passer à l’acte. Mais à l’époque, la « piste misogyne » n’avait pas été retenue. Ce qu’avaient dénoncé les féministes partout dans le monde. Elles avaient même lancé le mouvement #YesAllWomen (#OuiToutesLesFemmes).
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Alek Minassian a chanté les louanges d’Elliot Rodger il y a quelques jours. Ces criminels font partie de mouvements violemment antiféministes. L’examen du groupe des « Incel » dont fait partie l’auteur de la tuerie de Toronto laisse même penser qu’il y aurait de nombreux terroristes misogynes prêts à prendre les armes. Les Incels est l’abréviation anglophone de « involuntary celibate » (involontairement célibataire). Sur son mur Facebook le tueur avait écrit « La rébellion des Incels a déjà commencé. On va renverser tous les “Chads” et “Stacys”. » Les « chads » étant des hommes plutôt à l’aise avec les femmes et les « Stacy », des femmes en couple.
Plusieurs dizaines de milliers d’hommes se définissent comme « Incels » sur les réseaux sociaux, des hommes plutôt jeunes haïssant les femmes qui ne veulent pas d’eux. Ils se retrouvent principalement sur le réseau Incels.me interdit aux femmes mais aussi sur d’autres réseaux. Ils insultent les femmes, n’hésitent pas à s’encourager mutuellement à violer et considèrent les tueurs de femmes comme des héros. Ça ressemble fort à du terrorisme.
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