Des métiers moins rémunérés, sans progression de carrière possible, des aidantes, des divorces, des soucis de santé mal pris en charge… la situation financière des femmes se dégrade encore avec l’âge.
157 245 €, c’est en moyenne la somme que perdraient les femmes entre leurs 40 et leurs 60 ans, selon une étude de l’Observatoire de l’émancipation économique des femmes intitulée « Le coût de la séniorité des femmes ».
Avec cette nouvelle étude de son observatoire, la Fondation des Femmes, en partenariat avec le crédit municipal de Paris et ViveS Médias, alerte sur la vulnérabilité financière croissante des femmes âgées. Victimes à la fois d’âgisme et de sexisme, les « séniores » sont de plus en plus nombreuses à vivre dans la précarité.
Moins 7.862 € par an à partir de 40 ans
Chaque année à partir de 40 ans, les femmes perdraient en moyenne 7.862 €. Une salariée gagne en moyenne 22.830 € par an à 40 ans, et 21.410 € par an à 60 ans. Les hommes, eux, toucheraient 6.880 € de plus à 40 ans, et 8.020 € de plus à 60 ans selon les chiffres de l’Insee.
Pourquoi un tel écart ? La présidente de la Fondation des Femmes, Anne-Cécile Mailfert, explique à l’AFP : « les femmes ont choisi des emplois moins rémunérés, notamment des métiers du soin, il y a moins de progression de carrière, elles vont être confrontées à des problématiques de santé, d’aidance, de divorce, qui vont se cumuler et aggraver les choses ». Or, ajoute-t-elle, c’est précisément lors de ces 20 dernières années de carrière qu’est calculée la pension des retraité·es. Résultat, les écarts de pension de retraite atteignent presque 40 %.
Mieux vaut être vieux que vieille
Laëtitia Vitaud, autrice de cette note pour l’Observatoire, déplore : « Une femme qui vieillit est dévalorisée, tandis que son homologue masculin gagne en autorité et expertise. Trop souvent, les carrières féminines décrochent à la mi-vie. »
En outre, les séniores doivent faire face à une invisibilisation totale « dans les médias, les entreprises, et les politiques publiques ». « On ne s’occupe pas de celles qui n’ont pas le temps de faire parler d’elles, car elles s’occupent de tout le reste et de tout le monde », regrette Anne-Cécile Mailfert sur France Inter.
Leur santé est mal prise en charge. Alors que 20 à 25 % des femmes souffrent de troubles sévères de la ménopause, et que 87 % sont touchées par au moins un de ses symptômes, le monde du travail continue d’ignorer le problème.
Les femmes représentent par ailleurs 75 % des retraité·e·s vivant avec moins de 1000 € en France, et 60 % des personnes « ni en emploi ni en retraite ».
Des recommandations
Selon l’Observatoire, une explosion du nombre de séniores en situation de vulnérabilité est inévitable « sans action corrective ambitieuse ». « Il est urgent de lever le tabou de l’âgisme au féminin et de construire une société dans laquelle on peut bien vieillir, y compris en tant que femme », affirme Anne-Cécile Mailfert.
Mais comment ? L’Observatoire de l’émancipation économique des femmes fournit quelques recommandations. Entre autres : reconnaître la pénibilité du travail des femmes, mieux prendre en compte les symptômes de la ménopause, créer de nouveaux congés « aidants » et « grands-parents »… Elle suggère par ailleurs la mise en place d’une « majoration aidance », à l’instar de la majoration maternité. Ainsi, les femmes qui se dédient à temps plein ou à temps partiel au soin de leurs proches pourraient tout de même valider des trimestres.
Ces recommandations ne semblent pour l’instant pas avoir été entendues par le Medef. En plein « conclave » sur les retraites, l’organisation patronale annonçait le mardi 10 juin prioriser la question de l’impact de la maternité sur les carrières des femmes. Pas un mot, donc, sur la précarité des séniores, encore invisibilisées…