C’est une sélection qui fait « mâle ». Les 30 nominés pour le Grand Prix 2016 du festival de BD d’Angoulême sont tous masculins. Le Collectif de créatrices de bande dessinée contre le sexisme en appelle au boycott du vote.
Mise à jour, 6 janvier : l’initiative a fait des vagues, avec la prise de position de plusieurs auteurs. Et le Festival a fini par annoncer une nouvelle liste avec des auteures. Voir notre dernier article sur le sujet.
Le FIBD – Festival International de Bande Dessinée – d’Angoulême vient de publier les noms des 30 candidats sélectionnés pour le Grand Prix 2016. Résultat ? Sur 30 sélectionnés, aucune femme. L’occasion d’être renommé le FIBD, Femmes Interdites de Bande dessinée, par le Collectif de créatrices de BD contre le sexisme, qui en appelle au boycott : « Nous ne voterons pas », affirment les membres du Collectif.
En amont du Festival, ce sont en effet les auteur.e.s qui votent pour leur confrère (de fait, pas leur consoeur) qui sera le lauréat du Grand Prix. Le FIBD y voit un geste démocratique. Ironique pour cette organisation qui oublie les femmes et dans laquelle les hommes se cooptent : « Nous rappelons que depuis 43 ans, Florence Cestac est la seule femme à avoir reçu cette distinction ».
« Nous nous élevons contre cette discrimination évidente, cette négation totale de notre représentativité dans un médium qui compte de plus en plus de femmes », s’indigne le Collectif, qui avait déjà en décembre dénoncé l’absence de parité aux postes décisionnaires du FIBD – au sein du comité de sélection et du grand jury.
Selon le dernier rapport Ratier 2015, établi par le secrétaire général de l’Association des critiques et journalistes de bande dessinée (ACBD), les femmes représentent 12,4% des 1 399 auteur.e.s européen.ne.s de BD francophones. En 2001 elles n’en représentaient que 7%.
Lire : La lente féminisation de la bande dessinée
Dans la sélection du Grand Prix 2016, sans surprise, les petits éditeurs ont été mis en avant. Le Prix permet en effet, au delà de l’impact honorifique, d’aider économiquement les auteurs qui se retrouvent médiatisés du jour au lendemain. Les femmes invisibles dans ce secteur très masculin n’auront donc pas droit à une médiatisation nécessaire qui leur manque cruellement. « Quel est donc le message envoyé aux autrices de bande dessinée et à celles en voie de le devenir ? », interroge le Collectif. « On voudrait les décourager à avoir de l’ambition, à poursuivre leurs efforts, que l’on ne s’y prendrait pas autrement. On en revient à la notion de plafond de verre, toujours aussi désastreux : on nous tolère mais pas en haut de l’affiche. Les femmes en bande dessinée, doivent rester des ‘auteurs confidentiels’ par usage ? »
Le Collectif de créatrices de bande dessinée contre le sexisme réclame donc une représentativité « réelle de ce qu’est la bande dessinée aujourd’hui (…) Il n’est plus tolérable que des créatrices de renom, dont la carrière est reconnue par tous et toutes, soient absentes des nominations de ce Grand Prix. »
En 2013, le collectif féministe la Barbe avait fait irruption à Angoulême. Arborant comme à leur habitude des barbes postiches, les activistes tenaient à « féliciter les organisateurs du festival pour leur virile régularité.