Après les hommes du « film Français » en « reconquête », le magazine « Diapason » joue les ingénus face à une cheffe.
« Un chien mord un homme, ce n’est pas une information. Un homme mord un chien, c’est une information.» Cette métaphore, utilisée dans les écoles de journalisme, doit apprendre aux enquêteurs en herbe ce qui fait information. Et manifestement, ce qui fait information pour un journal spécialisé dans la musique est… l’activité d’une cheffe d’orchestre : « elle chante, elle pense, elle dirige ». Ce sont les mots utilisés pour présenter la cheffe Barbara Hannigan. Si les auteurs de cette Une n’ont pas eu l’impression d’enfoncer une porte ouverte en écrivant cela, c’est sans doute parce qu’ils supposaient que chanter, penser et diriger était incongru pour une femme. Auraient-ils écrit d’un chef « il chante, il pense, il dirige » ?
Décidément, la presse fait son petit backslash cette semaine. Le film français a fait très fort lui aussi en mettant seulement des hommes à sa Une et en parlant de reconquête… comme si les hommes étaient décidés à reconquérir le peu de terrain qu’ils ont cédé aux femmes.
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Et pourtant il y a de la marge. Les réalisatrices sont encore très peu nombreuses tout comme les femmes cheffes d’orchestre. Ce sont encore principalement des hommes qui pensent la production culturelle. Mais ignorer les créatrices ou les présenter comme des exceptions qui confirment la règle d’un secteur « sans femmes » contribue à les marginaliser. Au lieu de banaliser la présence des femmes dans les milieux qu’elles peinent à conquérir, ces journaux renforcent les stéréotypes sur la place des hommes et des femmes dans la société.
Dans certains milieux, dans certains métiers, dans certaines fonctions l’homme est la norme, la femme l’exception. Et, le problème avec l’exception c’est qu’elle confirme la règle… En désignant des artistes, dirigeantes, diplomates, astronautes ou Prix Nobel… simplement par « une femme » les médias confirment la règle.
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