La 3e enquête « les Français.e.s et les représentations sur les violences sexuelles » montre quelques progrès mais aussi une forte persistance de la culture du viol… chez les plus jeunes en particulier.
Les Français.e.s sont un peu moins nombreux à penser qu’une femme peut prendre du plaisir à être forcée : 11 % contre 18% en 2019 et 21% en 2015. Ou que, quand les femmes disent « non » pour une relation sexuelle, elles pensent « oui » : 11 % contre 17% en 2019 et 19% en 2015 (dans ces 11% , c’est 16 % des hommes et 7 % des femmes). La moitié des personnes interrogées pense que « pour un homme, c’est plus difficile de maîtriser son désir sexuel que pour une femme ». C’est encore beaucoup, mais ils étaient 63% à croire à cette fable en 2015.
La 3e vague de l’enquête « les Français.e.s et les représentations sur les viols et les violences faites aux femmes » réalisée par l’institut IPSOS pour l’Association Mémoire Traumatique et Victimologie montre que la route sera encore longue pour en finir avec la culture du viol. 1035 adultes représentatifs de la population française ont été interrogés en novembre dernier. La culpabilisation des victimes d’agressions sexuelles et le mythe du violeur innocent vont toujours bon train.
L’enquête a soumis aux personnes interrogées 11 situations décrivant un viol. Et 44 % seulement des répondant.es estiment que la totalité des cas présentés sont des viols. L’affirmation « Menacer une personne pour qu’elle accepte d’avoir des relations sexuelles sans résistance » n’étant par exemple considéré comme un viol que par 64 % des répondant.es.
« Plus préoccupant : ce sont les jeunes âgés de 18 à 24 ans qui qualifient le moins ces situations de viol. » précise le rapport. Un jeune homme de 18-24 ans sur 3 déclare que la pornographie est un moyen comme un autre pour faire son éducation sexuelle. Ils sont nombreux à penser que beaucoup de femmes prennent du plaisir à être injuriées, forcées ou disent « non » mais ça veut dire « oui ». Pour 20% d’entre eux, « Forcer une personne à avoir un rapport sexuel alors qu’elle refuse et ne se laisse pas faire » ne constitue pas un viol (contre 8% de la population en général.) Ce chiffre monte à 30% (contre 18% des Français.ses en général) pour ce cas : « forcer sa conjointe ou sa partenaire à avoir un rapport sexuel alors qu’elle refuse et ne se laisse pas faire ».
Pour l’Association Mémoire Traumatique et Victimologie, ces croyances sont le résultat de l’exposition de ces jeunes « dès l’enfance à des contenus pornographiques, avec des contenus souvent violents et dégradants envers les femmes et une érotisation de la haine et de la violence envers les femmes, ainsi qu’à des jeux en ligne… »
Pourtant, globalement, les Français.es ont moins tendance à inverser la culpabilité. Ils sont tout de même 36% à juger qu’une attitude provocante de la part d’une femme en public déresponsabilise le violeur et c’est 6% de moins qu’en 2019. 33% d’entre eux considèrent que la responsabilité de l’homme est moindre si la femme qu’il a violée avait flirté avec lui mais ne voulait pas avoir de relations sexuelles. En 2019, 40% des personnes sondées le pensaient.
Concernant le viol conjugal, près d’une personne interrogée sur 5 considère qu’un rapport sexuel forcé au sein d’un couple n’est pas un viol. Autre mythe tenace : le recours des hommes à la prostitution permettrait d’éviter des viols. Presque la moitié des Français.e.s y croient…
Les stéréotypes qui sous-tendent la culture du viol restent très forts. Outre la fable sur les besoins sexuels des hommes, celle qui romantise la sexualité des femmes reste en vigueur. 65 % des « personnes considèrent que « les femmes ont besoin d’être amoureuses pour envisager un rapport sexuel. C’était 64 % en 2019, en nette baisse de 10 points par rapport à 2015. Il semblerait qu’on stagne sur certains points…
Et les femmes ont bien intériorisé les discours dominants : « plus d’1 femme sur 2 considère qu’il est plus difficile pour un homme que pour une femme de maîtriser son désir sexuel, 1 sur 5 que dans le domaine sexuel les femmes savent beaucoup moins ce qu’elles veulent que les hommes. »
Sur l’inceste, les mentalités avancent grâce au mouvement #MeTooInceste. Même si, 3 Français.es sur 5, en particulier des hommes considèrent que le risque de « délation » et de « fausses accusations » est important, un.e Français.e sur deux estime qu’on n’en fait pas assez pour médiatiser et dénoncer ce type d’actes. Pour les viols commis sur les mineurs, trois quarts des Français.es sont favorables à des mesures répressives fortes. L’extension des délais de prescription, voire l’imprescribilité de ces crimes suscite l’adhésion d’une large majorité.
Lire aussi dans Les Nouvelles News
QU’EST-CE QU’UN VIOL ? LES FRANÇAIS.E.S NE SAVENT PAS TROP
LE VIOL ? TOUJOURS PAS COMPRIS