En approuvant l’adhésion à ce traité international, les Eurodéputé.es veulent contraindre les six États européens qui ne l’ont pas signé à prendre des mesures pour lutter contre les violences misogynes.
Mercredi 10 mai, les eurodéputé.es ont approuvé l’adhésion de l’Union européenne (UE) à la Convention d’Istanbul luttant contre les violences misogynes. Un traité international du Conseil de l’Europe -organisation paneuropéenne regroupant 46 pays- adopté en 2011, qui oblige chaque État signataire à mettre en place une législation réprimant les violences domestiques et autres agressions telles que le viol conjugal et les mutilations génitales féminines, le harcèlement sexuel, le mariage forcé, et à prévoir des refuges pour les victimes de violences. La convention est entrée en vigueur en 2014 (lire : La Convention d’Istanbul entrera en vigueur le 1er août).
Lors d’un débat tendu mardi 9 mai au Parlement européen de Strasbourg, la commissaire européenne chargée de l’Egalité, Helena Dalli, avait lancé : « L’adhésion de l’UE va renforcer le cadre légal de l’Union et envoyer un message fort à toutes les victimes de violences faites aux femmes et de violence domestique ».
L’Union européenne avait signé la Convention en 2017 mais a tardé à la ratifier, en raison d’une absence de consensus au sein de ses États membres.
Vingt-et-un pays de l’UE l’ont déjà ratifiée mais parmi eux, la Pologne a annoncé son intention de s’en retirer. Les six pays qui ont refusé de la ratifier sont la Bulgarie, la Tchéquie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie et la Slovaquie. La Turquie, qui avait signé la convention est le seul pays à en être sorti, en 2021. Ces pays réprouvent entre autres le mot « genre » dans ce traité, et l’incitation à introduire à l’école des enseignements sur « les rôles non stéréotypés des genres ».
Lors des débats précédant l’approbation du texte dans l’hémicycle strasbourgeois, des eurodéputés d’extrême droite se sont lâchés, poussant la présidente de la séance à mettre en garde contre tout propos pouvant s’apparenter à des « discours de haine ». La résistance de l’extrême droite est symbolique de l’opposition à la protection des femmes. Pour des raisons de compétences de l’Union, la portée de l’adhésion de l’UE est pourtant limitée aux dispositions de la Convention d’Istanbul relatives à la coopération judiciaire en matière pénale et à l’asile.
« Données glaçantes »
Des « données glaçantes » selon les mots de l’eurodéputée française Karima Delli (groupe Verts) ont été citées. « Sept femmes meurent chaque jour sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint. » a-t-elle rappelé. avant d’ajouter : « Nous serons intraitables avec les six pays sur 27 qui agissent encore au mépris de nos droits.» Selon des données de l’Agence des droits fondamentaux de l’UE datant de 2014, une femme sur trois dans l’UE, a déjà subi des violences physiques et/ou sexuelles. 55% des femmes dans l’UE ont été victimes de harcèlement sexuel au moins une fois depuis l’âge de 15 ans.
« C’est un vote pour ces millions de femmes qui vivent dans la violence, dans l’insécurité et la peur, et nous disons maintenant que l’Europe a une tolérance zéro face à la violence à l’égard des femmes » a déclaré Arba Kokalari, eurodéputée suédoise (groupe PPE), l’une des corapporteures du texte avec Lukasz Kohut.
Les eurodéputés ont souligné que l’adhésion de l’UE à la Convention d’Istanbul ne dispensait pas les six États membres ne l’ayant pas ratifiée de le faire.