Elisabeth Borne a annoncé un plan de 5,5 milliards d’euros sur cinq ans pour, notamment, créer 100.000 places en crèche. Mais le manque d’attractivité des métiers de la petite enfance fait craindre un échec.
Pour conclure les travaux du Conseil national de la refondation (CNR) consacré à la petite enfance, la cheffe du gouvernement, Elisabeth Borne, a annoncé ce jeudi 1er juin à Angers, la création d’un véritable « service public de la petite enfance ». Un ambitieux plan prévoyant notamment la création de 100.000 places d’accueil supplémentaires pour les jeunes enfants d’ici à 2027, avec l’objectif d’aboutir à 200.000 en 2030. Un « apport financier supplémentaire » de 5,5 milliards d’euros cumulés sur 2023-2027 est prévu pour y parvenir. Ce plan fera partie de la future loi « plein-emploi » qui sera présentée au conseil des ministres de la semaine prochaine.
La première ministre a insisté sur le volet féministe de la démarche en déclarant que c’était un « énorme enjeu d’égalité femmes-hommes ». « C’est une barrière à l’emploi qui se lève, notamment pour les femmes. C’est l’assurance que chacun pourra bénéficier d’une solution d’accueil pour son enfant, quel que soit son revenu, quel que soit le lieu où il habite » a-t-elle déclaré dans un entretien à Ouest-France la veille du CNR.
Cette annonce arrive moins de deux mois après la publication d’un rapport accablant de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur les cas de maltraitance dans les établissements d’accueil, rapport commandé par l’exécutif suite à la mort d’une fillette dans une crèche de Lyon en 2022.
La première ministre a aussi parlé de renforcer la formation des professionnels et le contrôle des crèches. « Dans les micro-crèches [moins de 10 places], la présence de deux adultes sera obligatoire dès le premier enfant » a-t-elle dit. Et l’agréement des crèches sera limité à dix ans, avec un point d’étape à mi-parcours. Elle a également indiqué que des « points d’accueils permettant d’informer et d’orienter les parents vers des solutions de garde » seront créés dans « toutes les communes de plus de 10.000 habitants ».
Le baromètre économique de la petite enfance publié par la Fédération française des entreprises de crèche indiquait qu’en 2019, il manquait 230.000 places de crèche en France, malgré les 450.000 existantes.
Pour renforcer l’attractivité du métier, la cheffe du gouvernement a annoncé « une campagne de valorisation », mais concernant la rémunération des professionnel.les, la question est renvoyée à de prochaines négociations. Dans ce métier très féminisé, les rémunérations sont très faibles.
L’annonce a été accueillie avec scepticisme. D’abord parce que le métier manque cruellement de professionnel.les formé.es. Le Syndicat national des professionnels de la petite enfance, indique qu’il en manque déjà 10.000 à l’appel pour assurer la totalité des postes existants. Il faudrait donc des formations express et une revalorisation conséquente du métier pour atteindre les objectifs fixés.
Autre interrogation : ce sont les communes, désignées comme « autorité organisatrice », qui devront piloter l’offre d’accueil mais elles n’auront aucune obligation de le faire. Il est prévu qu’en cas de défaillance de leur part, la Caisse d’allocations familiales prenne le relais, mais à ce jour, on ne sait pas trop comment. Dans quelques semaines, lors de la signature de la Convention d’objectifs et de gestion (COG) entre l’État et la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), la méthode pourrait être dévoilée.
Comme beaucoup de questions qui représentent un « énorme enjeu d’égalité femmes-hommes », celle du service public de la petite enfance fait l’objet de nombreuses annonces et de peu de réalisations (voir ci-dessous).
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