Pourquoi si peu de femmes dans certains champs académiques, comme la physique ou la philosophie ? Une étude observe que ces disciplines mettent l’accent sur le « talent inné », une qualité perçue à tort comme masculine.
« Les femmes sont moins présentes dans des disciplines universitaires dont les pratiquants estiment que le talent pur, inné, est la principale clé de la réussite. Et ce, en raison du stéréotype selon lequel les femmes ne possèdent pas ce talent ». C’est la conclusion d’une étude menée par Sarah-Jane Leslie, du département de philosophie de l’Université de Princeton aux Etats-Unis, publiée vendredi 16 janvier dans la revue Science.
Sarah-Jane Leslie et ses collègues ont interrogé plus de 1800 universitaires aux Etats-Unis dans 30 disciplines, sciences humaines et sciences dures. Et la corrélation est fortement significative. Les sciences physiques, les mathématiques, mais aussi la philosophie, sont les champs académiques dont les représentants estiment qu’ils requièrent une forme de « génie », de brillance intellectuelle. Et ce sont ceux dans lesquels on retrouve le moins de femmes. A l’inverse, ceux où le génie est jugé moins essentiel que la capacité de travail – comme les sciences de l’éducation, la psychologie et l’anthropologie – sont les plus féminisés.
Pas une question d’aptitude, mais d’attitude
Mais cela ne voudrait-il pas dire que les hommes sont effectivement plus intellectuellement brillants ? Pas du tout, assurent les chercheurs. Car il n’y a pas de lien entre la sélectivité des cursus et la proportion de femmes. C’est en amont que tout se joue. « Il ne s’agit pas d’une question d’aptitude, mais d’attitude à l’égard du ‘génie requis’ », assure Sarah-Jane Leslie. Cette culture du talent inné, combinée au stéréotype qui présente cette aptitude comme masculine, n’incite pas les femmes à s’engager dans ces disciplines, estiment les chercheurs.
« En sciences les femmes peuvent faire aussi bien que les hommes, sinon mieux. Le seul problème est que, jusqu’à récemment, personne ne le leur a dit », soulignait voilà un an la française Brigitte Kieffer, spécialiste du cerveau et lauréate 2014 pour l’Europe du Prix L’Oréal-Unesco pour les femmes et la science (Voir : Cherchez les chercheuses).
Dans une vidéo, Sarah-Jane Leslie cite des exemples de la culture populaire qui alimentent les représentations homme/talentueux, femme/laborieuse. Sherlock Holmes, Docteur House ou Will Hunting apparaissent comme possesseurs d’un « génie inné ». Alors que les femmes présentées comme intellectuellement brillantes, comme Hermione Granger dans Harry Potter, doivent leur capacité à leur force de travail.
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