Les hommages au grand cinéaste et écrivain se multiplient. Mais le traitement journalistique léger et admiratif de la notion de « séducteur brusque » interroge après la vague #MeToo.
« L’infatigable passeur de mémoire », dont le regard « a construit notre époque » selon les mots d’Emmanuel Macron, le réalisateur de « Shoah », Claude Lanzmann est mort le cinq juillet dernier et les hommages venant de la classe politique, du monde de la culture et de la presse se sont multipliés, à juste titre.
Cependant, une revue de presse de la journaliste et militante féministe Alice Coffin, montre que rien n’a changé dans les médias français toujours très indulgents, voire complices, à l’égard d’hommes qui peuvent avoir agressé des femmes.
Le titre de son billet est clair : « Portraits de Claude Lanzmann en « séducteur brusque « : la presse française n’a rien appris de #MeToo »
Elle a lu les hommages rendus dans Le Monde, Libération, Le Parisien et Les Inrockuptibles. Aucun n’indique que Claude Lanzmann a été accusé d’agressions sexuelles. Les articles souligne-t-elle « obéissent tous à la même logique. Ce sont des témoignages écrits par des hommes. Des journalistes qui se plaisent à présenter Claude Lanzmann comme leur ami. Aucun d’entre eux ne mentionne les accusations. Tous s’intéressent pourtant, de très près, à son rapport aux femmes. »
La relation avec les femmes est décrite de façon légère, comme au début de l’affaire DSK : « galant et séducteur envers les femmes », « séducteur insatiable, passionnément vivant », « séducteur brusque et enflammé », « séducteur narcissique » « il aimait à se vanter de ses conquêtes féminines et l’âge n’avait nullement atténué ses fanfaronnades ». Et toujours cette façon de présenter les femmes comme une activité parmi d’autres : « Le cinéma, la politique, les femmes… »
Dans les faits : Claude Lanzmann a été accusé d’agression sexuelle à deux reprises : par une policière israélienne, qui avait conduit son interrogatoire d’entrée dans le pays en 2012, et par une journaliste hollandaise, venue l’interviewer chez lui en 2017.Ces accusations n’ont pas eu de suite judiciaire. Elles n’ont pas été mentionnés dans les articles hommage, soit.
Mais ce traitement journalistique laisse penser que rien n’a changé depuis l’affaire DSK et #MeToo dans les journaux qui forgent l’opinion. Le concept de « séduction brusque » baignant dans des récits admiratifs laisse perplexe.
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