Les Comités Olympique et Paralympique ont annoncé un dispositif pour mieux prendre en compte la parentalité et permettre aux sportives d’allaiter leurs jeunes enfants. Une journaliste qualifie cette mesure de « caprice ». Polémique.
Le règlement est clair : aucune personne extérieure non accréditée ne pourra être hébergée au sein des villages olympique et paralympique. Mais dans un souci de bien-être des athlètes et notamment suite à une requête de la judokate Clarisse Agbégnénou, le Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF) et le Comité Paralympique et Sportif Français (CPSF) se sont penchés sur le sujet afin de trouver une solution.
Un objectif : mieux intégrer la question de la parentalité dans son ensemble lors de ces JOP. Pour cela, il était important de répondre à un besoin allant au-delà de celui des mères allaitantes et qui permette à tous et à toutes de concilier leur rôle de parent à celui de sportif·ve. Suite à un travail mené conjointement, les deux comités se sont mis d’accord sur un dispositif inédit, avec, certes des modalités différentes entre les Jeux Olympiques et les Jeux Paralympiques, mais sans enfreindre la règle de base. Publié ce lundi 26 février, un communiqué de presse en précise les modalités. Et ajoute que « ces dispositifs sont une première dans l’histoire de l’Equipe de France et ont pour vocation de perdurer pour les prochaines éditions des Jeux Olympiques et Paralympiques ».
Comité National Olympique et Sportif Français
Pour les athlètes qui allaitent, le communiqué fait état d’une « volonté de mettre en place un espace dédié à l’hôtel Pleyel, qui est à proximité immédiate du village, ainsi que la réservation de chambres afin que les mamans puissent y dormir avec leur enfant ». En ce qui concerne les parents et leurs enfants, un espace de convivialité de 100m², aux couleurs de l’Equipe de France, sera aménagé dans le but de recevoir en journée parents et enfants, sans limite d’âge.
Le CNSOF précise également que « dans un souci de la stratégie de performance », « les familles des athlètes n’auront pas accès au village olympique ». Cet accès sera réservé aux staffs non accrédités, tels que les médecins, préparateur·rices physiques, psychologues… ou encore les président·es de fédérations.
Comité Paralympique et Sportif Français
Quelques dérogations cependant pour les équipes paralympiques. La première pour les athlètes résidant au village et ayant des enfants de moins de 1 an. Ces derniers pourront bénéficier de 2 guest pass par jour (accès de 9h à 21h). Une dérogation supplémentaire pourrait même être accordée pour des enfants plus âgés « dès lors qu’un besoin spécifique de l’enfant à maintenir un lien fréquent avec l’athlète parent sera démontré (allaitement, enfant en situation de handicap) ». La deuxième dérogation concerne les athlètes parents d’enfants âgés de 0 à 3 ans qui pourront être hébergés par le CPSF en dehors du village olympique. Le communiqué précise que toutes ces demandes seront étudiées individuellement en lien avec les fédérations et qu’une dérogation peut être envisagée, selon les cas, pour les enfants de plus de 3 ans.
L’installation d’un espace athlètes et familles, ouvert aux coachs et accessible par des navettes, est également prévu au sein du Club France. « Les athlètes pourront aussi aller sur les sites de compétition, une fois les épreuves terminées, avec leurs enfants, via la billetterie mobilisée dans le cadre de Gagner en France.»
Quand France Pierron y voit « un caprice », des athlètes lui répondent
Alors que l’ensemble du monde sportif se réjouit d’une telle annonce, la journaliste France Pierron enflamme le débat dans l’émission L’Équipe de choc sur la chaîne L’Équipe. Elle évoque son point de vue personnel : « Être parent c’est propre à chacun, je ne vais pas juger, donner de leçon. Mais je trouve que ça sonne un tout petit peu comme un caprice ». Elle n’hésite pas à comparer sa situation personnelle de maman solo qui ne demande pas d’aménagements lorsqu’elle part pendant trois semaines en reportage. Toujours de son point de vue, elle ajoute « Si tu choisis cette vie d’athlète, tu peux être parent mais tu sais que ça implique des sacrifices et aux Jeux encore plus qu’ailleurs ».
Réactions divisées sur les réseaux sociaux. Beaucoup d’internautes ne comprennent pas une telle déclaration. Quant aux détracteur·ices, ils et elles soutiennent les propos de la journaliste. Leur argument principal : les athlètes ne sont pas les seul·es à devoir s’absenter plusieurs jours/semaines loin de leur famille et ne bénéficient pas pour autant d’aménagements.
Certaines sportives (concernées !) ont quant à elle réagit sur les réseaux sociaux à l’intervention de France Pierron. Une question qui revient est celle de la durée. Si la journaliste parle d’une semaine de compétition, les athlètes lui rappellent qu’une compétition se prépare et que cela va bien au-delà. Elles soulignent aussi l’importance de se battre pour intégrer de la meilleure des manières la maternité à une carrière sportive.
Sur X, l’athlète Ayodele Ikuesan lui répond : «On fait des sacrifices tous les jours ! Quand on est au travail, à l’entraînement, en déplacement : on ne voit pas nos enfants donc non ce n’est pas un caprice».
La basketteuse (tout juste retraitée) Isabelle Yacoubou répond quant à elle que grâce à ce type d’aménagement, elle aurait sûrement pu prolonger sa carrière : « Ancienne internationale, si j’avais eu ces aménagements j’aurais peut-être pu continuer à porter le maillot 🇫🇷. Et une année olympique en tout cas dans un sport comme le basket c’est 3 semaines de compétition mais au moins autant de préparation et pour avoir allaité 6 semaines sans que bébé tête même en tirant le lait c’est pas la même chose. Alors quand des choses sont mise en place pour faciliter la vie et l’organisation des mamans il faut les saluer et encourager et si on en est incapable on s’abstient…»
Valériane Ayayi écrit pour sa part : « En effet être parent c’est très personnel ! Nous nous battons pour normaliser la maternité dans le sport de haut niveau. Il n’y a ici pas de «caprice», il est plutôt question de faire évoluer les choses dans le sens des parents qui se sacrifient TOUT AU LONG DE LA SAISON et non « pendant 1 semaine » de l’année. En quoi améliorer le quotidien des athlètes qui souhaitent partager cette expérience avec leurs enfants serait un problème s’il y en a la possibilité ? Personnellement, je ne souhaite pas que ma fille soit avec moi sur le village ! Mais je suis déterminée à faire ce qu’il y a de possible pour que ce soit le cas pour les parents qui le souhaitent. Évoluons ensemble dans ce sens, sans toujours rapporter les choses à soi-même et à ses choix et contraintes personnels ».