Biochimiste, spécialiste de « ARN messager », celle qui est à l’origine de vaccins contre le Covid-19, travaillait dans l’ombre depuis 40 ans.
Désormais, tous les journaux se l’arrachent depuis que ses travaux sur l’ARN messager ont inspiré les vaccins anti-Covid. Les médias de son pays d’orgine, la Hongrie, repris ici par Courrier International mais aussi des médias du monde entier. Mais c’est récent.
Katalin Kariko a émigré aux Etats-Unis dans les années 80 quand la Hongrie vivait encore sous occupation soviétique, et vit depuis dans l’Etat de Pennsylvanie. A son arrivée, elle intègre l’université Temple où commence son travail sur l’ARN messager et elle participe notamment à un essai clinique de patients atteints du Sida. Elle rejoint ensuite l’Université de Pennsylvanie comme professeure. Mais à l’époque l’université concentrait ses recherches autour de l’ADN et ne voyait pas l’intérêt de son travail. Katalin Kariko se voit alors écartée de la liste des titularisations et rétrogradée au rang de chercheuse.
Pour autant, la biochimiste ne baisse pas les bras et continue son travail dans l’ombre. Dans son milieu professionnel, son travail ne suscite pas plus d’excitation. Et ce n’est pas sa seule déception. Femme, immigrée, elle fait face à un sexisme récurent au fil des années. Alors qu’elle est à la tête de son propre laboratoire, on demande à parler à son superviseur. On l’appelle « madame », quand les hommes sont appelés « professeur ».
En 1997, Katalin Kariko fait la connaissance de l’immunologiste américain Drew Weissman avec qui elle va collaborer. En 2005, dans le cadre de recherches sur le VIH, ils font une découverte qui permet une modification de l’ARN, ce qui va sortir le duo de l’ombre et leur donner un peu plus de crédibilité. Le principe est le suivant : avec un vaccin classique, on injecte une protéine du virus, tandis que l’ARN messager dit aux cellules comment fabriquer la protéine. Et c’est cette découverte, qui va permettre 15 ans plus tard, la création du vaccin contre le Covid-19.
Encore inconnue du grand public il y a quelques mois, et après avoir été méprisée par ses pairs et par les médias, son invention pourrait mettre un terme à la pandémie mondiale. Désormais son nom sera probablement cité parmi les candidats au Prix Nobel et cette technique pourrait permettre de développer de nouveaux types de traitements contre d’autres maladies comme le cancer ou le diabète.