Après la charge mentale, la dessinatrice Emma met en ligne, pour les confiné.e.s, une histoire inédite du tome 3 de « la charge émotionnelle ». Une histoire qui sera pour beaucoup une révélation.
Après avoir contribué à populariser la notion de charge mentale, la dessinatrice Emma s’est attaquée à la « charge émotionnelle » avec un album sorti en 2018 « La charge émotionnelle et autres trucs invisibles.»
La charge mentale, rappelons-le, c’est, pour les femmes essentiellement, le fait de devoir penser à tout pour organiser la vie du foyer, du rendez-vous chez le médecin aux menus de la semaine en passant par les réservations pour les vacances ou le cadeau d’anniversaire. Tandis que les hommes, majoritairement, disent, au mieux, « fallait me demander ». La charge mentale, invisible et épuisante n’a pas toujours été bien comprise par les médias français qui se sont mis à rendre les femmes coupables du poids qu’elles avaient à porter sur leurs épaules. Et, du coup, Emma a sorti un nouvel album : « La faute des femmes » (voir : Charge mentale : en parler c’est bien, sans en rajouter, c’est mieux)
Mais il n’y a pas que ça. La charge émotionnelle, encore plus invisible, consiste pour les femmes à assurer le bien-être psychologique des autres au détriment du leur. La planche qu’Emma a mis en ligne pour les confinés s’intitule « le pouvoir de l’amour ». Et au nom de l’amour par exemple, sur un dessin une des deux copines dit qu’elle a renoncé à ses cours de danse. Ce soir-là, c’était son compagnon qui s’occupait des enfants et quand elle rentrait, il « était de mauvaise humeur et faisait la gueule ». Pour préserver le bien-être de tous elle a sacrifié sa soirée danse hebdomadaire. Mais contrairement à son compagnon, elle ne se montrait jamais de mauvaise humeur. Assurer le «confort émotionnel» des autres c’est aussi rire à des blagues pas drôles, être une hôtesse d’accueil souriante en dépit de grossièretés, décorer le bureau ou apporter des gâteaux aux collègues, être prévenante quand le compagnon est malade ou multiplier les attentions pour faire plaisir. « Nous devenons progressivement les mères et les infirmières de nos conjoints plus que leurs partenaires » écrit Emma .
Elle constate que « l’effort émotionnel est souvent à sens unique. » Et reprend la politologue islandaise Anna Guðrún Jónasdóttir qui résume la situation ainsi : « dans les couples hétérosexuels, les femmes expriment leur amour en prenant soin de l’autre tout en sacrifiant leurs propres besoins. L’homme se nourrit de cette relation pour prendre sa place dans le monde extérieur plutôt que de retourner à sa partenaire une attention réciproque.» C’est le pouvoir de l’amour…
Alors que faire pour que ça change ? Certainement pas cesser de prendre soin des autres. C’est « aux hommes d’investir la sphère émotionnelle » conclut Emma. « ça ferait une société meilleure non ? »