Augmentation de la pauvreté des femmes, déscolarisation des filles, violence physique et économique,.. A mi-parcours vers les objectifs de développement durable, l’objectif d’égalité des sexes s’éloigne indique un rapport chiffré qui déplore une « résistance active ».
L’égalité des sexes sera impossible à atteindre d’ici 2030 en raison de «préjugés profondément ancrés dans le monde entier» a alerté l’Organisation des Nations Unies (ONU) dans un rapport publié le 7 septembre, « The Gender Snapshot 2023 ». faisant suite au rapport plus global sur les objectifs de développement durable (ODD)
Lire : Les ODD pour un monde meilleur sont « en péril » alerte l’ONU
« Le monde laisse tomber les femmes et les filles », affirment ONU Femmes, l’agence de promotion de l’égalité des sexes, et le Département des affaires économiques et sociales de l’ONU. Le rapport a chiffré les besoins : il faudrait un investissement supplémentaire de 360 milliards de dollars par an pour assurer l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes d’ici 2030. On n’en prend pas le chemin. Les chiffres indiqués dans ce rapport sont accablants.
Symptomatique du mépris mondial pour la cause des femmes : le sort des femmes âgées. Le rapport fait un focus sur elles cette année. Elles sont confrontées à des taux de pauvreté et de violence bien plus élevés que les hommes âgés. Dans seulement 28 des 116 pays étudiés des données sont disponibles, l’absence de chiffres étant déjà un signe d’abandon. Et, dans ces pays supposés s’intéresser à elles, moins de la moitié des femmes âgées bénéficient d’une pension ; dans 12 de ces pays, moins de 10 % ont accès à une pension.
Concernant l’accès à l’éducation -qui augmente pour les filles et les garçons- des millions de filles n’entrent jamais dans une salle de classe ou n’achèvent jamais leur éducation, en particulier dans les zones de conflit. En 2023, 129 millions de filles ne sont pas scolarisées dans le monde, elles pourraient être encore 110 millions en 2030. Rappelons qu’en Afghanistan, les talibans ont interdit, en 2022, l’éducation des filles au-delà de l’école élémentaire.
Aucun pays n’est parvenu à éradiquer la violence conjugale et seuls 27 pays disposent de systèmes complets de suivi et d’allocation budgétaire relatifs à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes. Chaque année, 245 millions de femmes de plus de 15 ans sont ainsi victimes de violences physiques de la part de leur partenaire, une femme sur 5 est mariée avant 18 ans.
L’objectif du travail décent est très loin d’être atteint pour les femmes. Pour chaque dollar de revenu du travail gagné par les hommes les femmes ne gagnaient que 51 cents en 2019. Moins de deux tiers des femmes âgées de 25 à 54 ans – 61,4 % – faisaient partie de la population active en 2022, contre 90,6 % des hommes, et les femmes étaient beaucoup moins bien payées. Et les femmes effectuent chaque jour 2,8 heures de tâches domestiques non payées de plus que les hommes
Dans les domaines de la science, de la technologie et de l’innovation, le rapport indique que « des obstacles persistants liés au genre limitent le rôle des femmes ». « En 2022, les inventeurs figurant sur les demandes de brevets internationaux étaient cinq fois moins souvent des femmes que des hommes. Et en 2020, les femmes n’occupaient qu’un poste de recherche sur trois dans le monde et seulement un emploi sur cinq dans le domaine des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STEM).
Dans le pire des scénarios climatiques, l’insécurité alimentaire devrait toucher 236 millions de femmes et de filles supplémentaires, contre 131 millions d’hommes et de garçons supplémentaires.
Dans les postes de décision, les femmes ne détiennent que 26,7 % des sièges parlementaires, 35,5 % des sièges dans les gouvernements locaux et 28,2 % des postes de direction au travail.
Pour ONU Femmes, l’incapacité persistante à faire de la réalisation de l’égalité des sexes une priorité mettra en péril la réalisation de l’ensemble des ODD.
Le rapport qualifie le financement des programmes de promotion de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes d’ « inadéquat, imprévisible et réparti de manière incohérente entre les pays », précisant qu’entre 2020 et 2021, cette aide gouvernementale représentait « à peine 4 % du total de l’aide bilatérale, soit une baisse notable par rapport aux 5 % des années précédentes »
Présentant à la presse le nouveau rapport, la sous-secrétaire générale de l’ONU Maria-Francesca Spatolisano a déploré : « la résistance active à l’égalité des sexes et le sous-investissement chronique sont des facteurs clés de la lenteur des progrès et, dans certains cas, de l’inversion des gains déjà réalisés ».

