Un rapport du HCE dresse la liste des moyens humains et financiers sans lesquels l’égalité entre femmes et hommes ne pourra pas devenir réalité
Lois non appliquées, action gouvernementale qui s’étiole après des campagnes électorales dithyrambiques… pour réduire les inégalités entre femmes et hommes, la priorité n’est pas de légiférer mais d’appliquer les lois, les promesses et mettre l’administration en mouvement. Et cela demande des moyens humains et financiers.
A la demande de Marlène Schiappa, Secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, le sage et expérimenté Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) a réalisé un rapport qui annonce le programme dans son titre : « Investir dans l’organisation administrative et institutionnelle des Droits des femmes : première brique d’une véritable transition égalitaire »
Et de commencer par rappeler quelques constats sur l’inapplication des lois. Si l’égalité professionnelle est inscrite dans la loi depuis… 1972 : « la majorité des entreprises est aujourd’hui hors la loi. Ainsi, seules 40% des entreprises assujetties à l’obligation d’être couvertes par un accord collectif relatif à l’égalité, ou, à défaut, par un plan d’action sur l’égalité professionnelle, sont en règle. 60% des entreprises ne le sont donc pas. » note le rapport.
Même inapplication des lois sur les violences : à peine 1% des violeurs sont aujourd’hui condamnés et ceci malgré des progrès dans la compréhension du phénomène ou dans l’accueil des victimes. Le HCE n’hésite pas à parler de « décalage abyssal entre la réalité massive des faits de viol, par exemple, et la très insuffisante judiciarisation et condamnation de ce crime »
Côté égalité dans les instances politiques, l’application des lois est biaisée: « les postes-clés demeurent encore majoritairement aux mains des hommes. »
Alors que faire ? Du concret ! Les 42 recommandations du HCE « pour engager un réel tournant dans la lutte contre les inégalités et garantir une transition égalitaire attendue » en appellent à des moyens pour appliquer la loi. Des moyens, cela veut dire davantage de postes dédiés à la mise en application de l’égalité partout où c’est nécessaire. Mais aussi un contrôle permanent de l’application des lois et des politiques publiques. Le HCE préconise par exemple « des points d’étape trimestriels en Conseil des ministres »
Le HCE veut aussi former les décideurs publics, et cela demande des moyens. Il faudra que ces décideurs acceptent de lâcher leurs tâches habituelles pour se consacrer à ces formations, les mettre sur pied et qu’elles soient assez costaudes pour « faire de l’égalité entre les femmes et les hommes un réflexe des décideurs ». Un premier plan national de sensibilisation devrait, selon le HCE, s’adresser « en priorité au Gouvernement et aux cabinets, aux Directions des administrations centrales, aux Inspections ministérielles et interministérielles, aux équipes préfectorales, ainsi qu’aux étudiant.e.s de l’Ecole Nationale d’Administration, de l’Institut national des études territoriales (INET), et des Instituts régionaux d’administration (IRA). »
Le HCE ne croit pas à la réussite de l’égalité sans « objectifs chiffrés ambitieux et [de] financements adaptés.» « Il n’y aura pas d’égalité entre les femmes et les hommes sans moyens dédiés à la hauteur des besoins, Des moyens humains et des moyens financiers » insiste Danièle Bousquet, la présidente du HCE.
Des moyens, de l’argent, des postes…Ces moyens sont déjà très faibles, le budget droits des femmes a été amputé de 25% en dépit d’annonce d’une « grande cause nationale » et tous les ministères sont à la diète. Si la secrétaire d‘Etat veut mettre en application ces préconisations, l’exercice risque d’être assez acrobatique.
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