Les anti-IVG bénéficient de très gros moyens pour manipuler l’opinion. Il devient urgent de sécuriser le droit à l’avortement et à la contraception par un projet -et non une proposition- de loi constitutionnelle. Explications.
Mercredi 28 septembre, journée internationale du droit à l’IVG (interruption volontaire de grossesse), le Planning familial a présenté un nouveau site internet ivg-contraception-sexualites.org, « pour lutter contre la désinformation sur internet ». Cette initiative, soutenue par la Fondation des femmes, s’inscrit dans un contexte international très inquiétant avec des reculs de ce droit à l’IVG partout dans le monde (voir ci-dessous). Et surtout, ce site doit faire face à un tsunami de messages envoyés par les croisés anti-avortement partout sur la Toile. Une démarche bien organisée que la loi créant un délit d’entrave numérique n’a pas vraiment réussi à endiguer.
Ces croisés anti-IVG créent des sites prétendant informer et poussent les femmes en détresse à renoncer à avorter. Ils financent des armées de « trolls » allant sur les réseaux sociaux harceler les militantes des droits des femmes jusqu’à les épuiser et sont épaulés par de grands cabinets de lobbying pour influencer les responsables politiques et médias.
Comme le dit Anne-Cécile Mailfert, Présidente de la Fondation des femmes, « le droit à l’avortement est une question d’argent ». Les fonds qui proviennent notamment des milieux religieux des Etats-Unis, d’Europe ou de Russie pour mener la croisade en ligne contre ce droit des femmes affluent. Une étude du Parlement européen intitulée « la pointe de l’Iceberg : Financeurs contre les droits humains relatifs à la sexualité et à la santé reproductive en Europe» indique que 707,2 millions de dollars ont servi à financer cette guerre sur la période 2009-2018. Les dépenses annuelles anti-IVG en Europe ont été multipliées par quatre, passant de 22,2 millions de dollars en 2009 à 96 millions en 2018. Et la France serait la première destinataire de ces fonds (la « manif pour tous » en aurait grandement bénéficié).
Pourquoi un projet de loi
Face à cet afflux de moyens pour manipuler l’opinion, il est indispensable d’inscrire le droit à l’IVG dans la constitution. Et pour l’inscrire dans la constitution, mieux vaut passer par un projet de loi que par une proposition de loi. Comme nous l’expliquions ici : selon l’article 89 de la constitution, les « projets de loi constitutionnels » -présenté par le gouvernement- et « propositions de loi constitutionnelles » -présentées par les parlementaires- peuvent être adoptés par référendum. Mais, seul le « projet de loi constitutionnelle » peut être adopté par les trois cinquièmes de l’ensemble des parlementaires (député.es et sénateurs.trices) réunis en congrès.
Or, si la disposition doit être adoptée par référendum, la bataille de l’opinion pourrait être très dure face aux lobbys anti-IVG qui tissent leur discours sur la Toile avec de puissant soutiens. Autre risque : voir la question du référendum se transformer en « pour ou contre la majorité présidentielle » et éclipser la question de l’IVG…
Lors de la conférence de presse de présentation du nouveau site du planning familial, responsables associatives, parlementaires et militantes ont imploré la ministre en charge des Droits des femmes, Isabelle Rome, de convaincre le gouvernement de déposer un projet de loi. La sénatrice écologiste Mélanie Vogel, qui a déposé une « proposition de loi » en ce sens s’est dite enthousiasmée à l’idée de retirer sa proposition à la faveur d’un projet de loi. Elle sait que « Sur des sujets comme ça, ce sont plutôt les contre qui se mobilisent. » Isabelle Rome n’a pas pris d’engagement…
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