Une nouvelle bande dessinée imagine un monde où les personnes menstruées seraient… les hommes. Délirant ? Décapant ? Jubilatoire ? On vous dit tout.
Un cowboy super viril mais à fleur de peau, un employé qui gueule, sans aucune gène, dans l’open space afin de s’enquérir d’une serviette hygiénique ou encore une tablée de ministres (hommes) qui évaluent l’important budget consacré au financement des règles… Ce sont quelques-unes des situations imaginées par Eric la Blanche (scénario) et Camille Besse (dessin) dans leur bande dessinée « Si les hommes avaient leurs règles ».
Avec cette dystopie humoristique, ce duo ré-écrit l’Histoire pour proposer une réalité inversée dans laquelle les hommes seraient ceux qui, une semaine par mois, saigneraient. Un postulat farfelu ? En 1978, déjà, la journaliste et militante féministe américaine Gloria Steinem signait un article dans le magazine Cosmopolitan : « À quoi ressemblerait le monde si les hommes avaient leurs règles ? ». Sa conclusion : « Les menstruations deviendraient une manifestation de virilité enviable et dont on pourrait se vanter ». Inspiré par cette déclaration, le duo aux manettes de la BD s’est amusé à appliquer cette hypothèse à des situations quotidiennes, historiques, politiques… Ainsi, de la préhistoire à nos jours, en passant par divers événements (le débarquement de Normandie !), ils imaginent des scènes loufoques, drôles et même gentiment grinçantes. C’est ainsi que l’on croise dans la BD des jeunes filles qui veulent à tout prix acheter un pantalon blanc aux tâches rouges… Ces tâches de sang qui nous paraissent habituellement si honteuses dans notre quotidien. « L’idée était de montrer qu’une manifestation physiologique comme les règles, quand on la transpose du côté des dominants, devient un outil de domination, un motif de fierté, un marqueur de virilité et même une industrie dans la mesure où ce phénomène devient désirable » explique Éric la Blanche.
Si l’auteur et la dessinatrice proposent une première lecture qui dédramatise le sujet des règles avec de courtes intrigues réellement drôles et bien vues, leur BD a aussi du fond. Au fil de la lecture, le contraste avec la réalité de notre quotidien saute aux yeux et souligne au feutre rouge que ce tabou autour des règles n’est que culturel et donc absurde. « Ce que j’espère c’est qu’on lise ce livre comme quelque chose de très léger, confie la dessinatrice, mais qu’à la fin des 100 pages, quelque chose ait infusé chez le lecteur, sans même qu’il s’en rende compte. Et ce « quelque chose », c’est un message, une réflexion sur la domination. ». Pari réussi. C’est donc une double victoire pour cette BD qui brise le tabou autour des règles et livre une véritable réflexion sur les questions de genre. Notre avis ? Jubilatoire.
Infos : Si les hommes avaient leurs règles, d’Eric la Blanche (scénario) et Camille Besse (dessin), éditions Le Lombard, 112 p., 15,45€. En librairie depuis le 9 septembre.
le 9 septembre.

