« On ne tue pas par jalousie mais par choix », un article de La Dépêche reprenant le réquisitoire de l’avocate générale ne laisse aucune place à l’idée de « crime passionnel »
C’est assez rare pour être remarqué. Quelques jours après que le Trumblr #LesMotsTuent ait compilé 350 articles de presse atténuant des crimes sexuels ou meurtres de femmes par leur conjoint, un article du quotidien régional La Dépêche évite tous les écueils possibles. Même les reprises des propos de l’avocate du meurtrier ne jouent pas la carte du « crime passionnel »
Le journaliste Bernard Ducom raconte la condamnation par la cour d’assises du Gers, d’un homme ayant assassiné sa compagne à coups de couteau. Dès le titre, le ton est donné : « A Auch, 25 ans de réclusion pour avoir tué sa compagne »
Dans l’article, pas une once de romantisme, pas la moindre expression minimisant l’horreur de ce crime. Au contraire, il reprend entre guillemets les arguments impeccables de l’avocate générale Charlotte Béluet. Elle a requis 25 ans de prison parce que l’homme a « donné volontairement la mort » (…) « Mateos voulait Fabienne comme ses précédentes compagnes, soumise à son emprise totale. Il l’a frappée parce qu’il s’en sent propriétaire, en la tuant il s’en rend propriétaire » (…) « Il n’y a pas eu de lutte, il a tué Fabienne délibérément pour ne pas qu’elle lui échappe ». (…) « On ne tue pas par jalousie mais par choix » Et le journaliste de préciser : « la magistrate réfute le crime passionnel (‘ le crime d’amour n’existe pas à la différence du crime d’amour-propre ‘) et selon elle ‘il n’y a pas de place pour l’altération du discernement’ »
Aucun des arguments de l’avocate du meurtrier ne pouvait être retenu. Ni son enfance malheureuse auprès d’un père violent, ni son bégaiement non soigné qui le rendait agressif, Encore moins la drogue ou l’alcool qui sont des circonstances aggravantes et non atténuantes. L’avocate a bien appelé à juger un homme fragile et non un « fait de société » en faisant allusion aux récents mouvements de lutte contre les violences faites aux femmes mais c’était peine perdu. Ce mouvement a au contraire mis en lumière la gravité de ces crimes jusqu’ici minimisés et permis aux jurés de suivre l’avocate générale.
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