Dans le Jura, un jeune agriculteur inexpérimenté brigue la médaille du meilleur fromage de Comté. A la fois récit initiatique et bouffée de jeunesse, le film de Louise Courvoisier est un cadeau pour les yeux et pour le cœur.
Anthony, dit Totone, a 18 ans, une bande de copains et la vie devant lui. Brutalement, le voici orphelin, en charge de sa petite sœur et d’une ferme de 120 hectares. Résumé ainsi, « Vingt Dieux » pourrait être un drame social tire-larmes. Eh bien pas du tout ! Car Totone, glandeur sans expérience ni moyens, choisit de tenter le concours du meilleur fromage de Comté de la région. Et ce premier film devient une chronique drôle et puissante de la jeunesse rurale française. Dans ce western rural, les cow-boys chevauchent des tracteurs et des mobylettes, et les denrées les plus précieuses sont le lait cru et le chaudron dans lequel on fabrique le Comté. C’est bien heureusement un western mixte, car Totone et ses copains sont épaulés par trois femmes. La petite sœur de sept ans fait partie de l’équipée à part entière ; une fromagère bourrue partage avec lui son talent du métier. Et surtout, Marie-Lise, jeune agricultrice franche et sûre d’elle, lui apprend – entre autres – à « se sortir les doigts du cul ».
Louise Courvoisier : J’avais envie de filmer cette jeunesse peu représentée au cinéma, qui part dans l’existence avec moins de chance que beaucoup d’autres, et d’en faire un portrait « de l’intérieur », positif et nuancé.
Louise Courvoisier a un talent rare, celui de tirer le meilleur de ses acteurs, des non-professionnels majoritairement agriculteurs du Jura, pays où elle a grandi. Respectant la pudeur de ses personnages, elle les laisse s’exprimer en silence. Ainsi, nul besoin de scène d’enterrement pour comprendre la détresse d’Anthony à la mort de son père. Quant aux scènes d’intimité entre Totone et Marie-Lise, parfaites de naturel et de modernité, elles bousculent le « passage obligé » et souvent raté des scènes de sexe au cinéma. Elle a le sens du détail, de la narration et le respect de ses héros pourtant à l’échelle d’un petit village. Résultat, on aime ses personnages et on est emporté par le film.
Avec ce récit initiatique d’un jeune héros qui trouve enfin sa place ; la cinéaste trouve la sienne : un ticket d’entrée dans le cinéma français et on l’espère, auprès du public. Une jeune femme à suivre assurément.
« Vingt Dieux » de Louise Courvoisier (fiction, 1h30) Scénario de Louise Courvoisier, Théo Abadie, Marcia Romano. Avec Clément Faveau, Luna Garret, Maïwène Barthélémy. Musique Charlie et Linda Courvoisier. Produit par Ex Nihilo, distribué par Pyramide. Prix de la jeunesse à Cannes (Un certain regard) et au Festival du Film d’Angoulême.
Extrait:
2 commentaires
le Limousin n’est pas en Franche Comté! ;)
on ne fabrique du comté qu’en Franche Comté (AOC)
« Voyage en pays comtois » serait plus approprié :)
ou voyage au pays du Comté.
Merci :)