SMS d’alerte, messages pérennes, formation des personnels… le gouvernement a présenté son plan de « lutte contre le harcèlement sexiste et les violences sexuelles » dans les transports. « Il n’y a plus de tolérance, d’indifférence », assure la secrétaire d’Etat aux Droits des femmes.
Enfin ! C’est le commentaire qui revient le plus souvent, après l’annonce de mesures concrètes contre le harcèlement dans les transports. Jeudi 9 juillet, les secrétaires d’Etat chargés des Transports et des Droits des femmes, Alain Vidalies et Pascale Boistard, ont présenté un plan de « lutte contre le harcèlement sexiste et les violences sexuelles ».
« Les premiers rangs sont pour les femmes en uniforme », demandait le secrétaire général de la SNCF, Stéphane Volant, lors de la conférence de presse. Et de fait, elles étaient une dizaine, colonelle, cheffe de service des transports publics, directrice… La forme y était, mais le fond ?
Pour l’essentiel, le gouvernement a retenu les mesures et axes principaux impulsés par le Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes qui tirait, le 16 avril dernier, le signal d’alarme. « C’est la première fois que les autorités publiques s’emparent de ce sujet dans ce pays, c’est étonnant mais réel », remarquait Pascale Boistard.
D’ailleurs, le Haut Conseil à l’Egalité « se félicite d’avoir été largement entendu ». Tout en soulignant qu’il « accordera, dans les prochains mois, une attention toute particulière à la mise en œuvre de ce plan, à son financement et à son évaluation afin qu’il produise tous ses effets. »
« Le harcèlement sexuel n’est pas le résultat d’une culture grivoise latine, c’est un délit »
Ce nouveau plan national s’articule en trois axes (voir également en bas d’article). Le premier concerne la prévention. A cet égard les secrétaires d’Etat ont annoncé la mise en place de « marches participatives » d’usagères pour améliorer la sécurité des femmes dans les transports. « Il s’agit de visites de terrain des stations, des gares, des trains, des métros avec des groupes d’usagères, les transporteurs et les élus concernés (…) », explique Alain Vidalies. Cela permettra de manière très concrète aux acteurs de pouvoir améliorer les conditions des femmes dans l’espace public.
« Le fait de mettre dans le métro un panneau qui dit que le harcèlement est une faute, un délit, une agression, fait qu’on va se sentir plus en sécurité et plus légitime à en parler, à dire non, à poser ses limites » Alice Barbe, « Stop harcèlement de rue » |
« Les femmes sont moins atteintes physiquement dans les transports en commun mais elles ont un sentiment d’insécurité plus fort que celui des hommes : 6 femmes sur 10 déclarent craindre un agression ou un vol contre 3 hommes sur 10 ». Une lumière cassée, des odeurs suspectes, une mauvaise sonorisation peuvent en effet renforcer ce sentiment de peur. Le secrétaire d’Etat a d’ailleurs ajouté de manière très solennelle,comme pour mieux renforcer la légitimité du sujet : « Le harcèlement sexuel n’est pas le résultat d’une culture grivoise latine, c’est un délit. »
Ceci étant dit, l’axe « prévention » comprend également la mise en place d’une campagne de sensibilisation qui sera lancée en automne 2015 ainsi que des « messages pérennes ». Pour Alice Barbe, membre de l’association Stop au harcèlement de rue, qui a fortement participé à la mise en lumière du harcèlement dans les transports, le quotidien des femmes va changer : « Concrètement, le fait de mettre dans le métro un panneau qui dit que le harcèlement est une faute, un délit, une agression, fait qu’on va se sentir plus en sécurité et plus légitime à en parler, à dire non, à poser ses limites ».
La ville de Nantes s’est également portée volontaire pour expérimenter l’arrêt à la demande des bus la nuit. Une mesure calquée sur le modèle québécois et qui a pour ambition de se développer nationalement.
« On est assez satisfaits de voir que les transports publics, la SNCF, la RATP ont collaboré avec nous, on ne s’y attendait pas vraiment. »
Après la prévention, il s’agit de réagir, une volonté affirmée de la part du secrétaire d’Etat aux Transports : « A ceux qui pensent que nos mesures ne servent à rien nous leur laissons la passivité, nous avons choisi l’action ». De fait, on connaissait déjà les services d’alertes téléphoniques (le 3117 pour la SNCF et le 3224 pour la RATP) mais une mesure « innovante » selon Pascale Boistard consiste en l’instauration de l’alerte par SMS. Cela permettra aux témoins qui craignent pour leur sécurité de signaler une agression de manière plus discrète.
« On est assez satisfaits de voir que les transports publics, la SNCF, la RATP ont collaboré avec nous, on ne s’y attendait pas vraiment. Ce sont eux mêmes qui ont impulsé certaines mesures, notamment le SMS », révèle Alice Barbe. « Dans ce plan, les nouveaux outils numériques ont toute leur place, une arme indispensable dans le cadre de mutations sociétales », juge t-elle.
Enfin, afin de mieux accompagner les victimes de harcèlement, les personnels des transports publics seront formés et sensibilisés à la question du harcèlement sexiste parce que « le facteur humain est primordial » insiste la secrétaire d’Etat chargée des droits des femmes. « Il s’agit de renforcer les formations et la mixité ».
Pascale Boistard a par ailleurs annoncé qu’un travail sera engagé sur l’interdiction de diffusion de publicités sexistes dans les transports en commun (pas plus tard que le 7 juillet, une étudiante dénonçait celle des Galeries Lafayette dans le métro parisien). Avant de conclure : « Il n’y a plus de tolérance, d’indifférence, d’yeux fermés sur la question (…) Ce travail n’est qu’un début car ce sont les esprits qui devront changer, c’est une première pierre à l’édifice ».
Une conférence de presse comme une démonstration de la prise en charge du phénomène du harcèlement dans les transports. « Pour ceux qui trouvent que j’exagère, je vous propose une sorte de ‘vis ma vie’, et on en reparle » a lancé Pascale Boistard. « Il est temps d’agir pour ne plus laisser faire l’impunité ».