En insultant des militantes, Brigitte Macron a provoqué un tollé. Retournement du stigmate pour dénoncer une justice qui laisse s’évanouir l’immense majorité des plaintes pour viol. Et fin de la Grande cause.
Toutes des « sales connes » ! Depuis que Brigitte Macron a insulté des militantes, « sales connes » devient un cri de ralliement féministe. Dimanche 7 décembre 2025, l’épouse du président de la République a été filmée dans les coulisses du théâtre Folies Bergère à Paris, alors qu’elle était venue soutenir l’humoriste Ary Abittan. La veille, des militantes du collectif #NousToutes, avaient interrompu le spectacle, vêtues de masques à son effigie portant l’inscription « violeur », et scandant « Abittan violeur ! » L’humoriste a dit avoir « peur » à Brigitte Macron, qui a répondu dans un éclat de rire : « S’il y a des sales connes, on va les foutre dehors. »
Non-lieu ne signifie pas innocent
Les « sales connes » en question protestaient une nouvelle fois contre l’impunité des agresseurs sexuels. À la fin de 2021, l’humoriste a été accusé de viol par une jeune femme. L’instruction avait abouti à un non-lieu confirmé en appel en janvier dernier. Malgré des témoignages et un certificat médical mentionnant des lésions sérieuses et un stress post-traumatique, le tribunal a estimé qu’il n’y avait pas «assez d’éléments concordants ou graves» pour aller plus loin.
Sur les réseaux sociaux, les militantes remettent les idées à l’endroit. Elles rappellent que plus de 85% des plaintes pour viol se terminent par un non-lieu. Que « non-lieu » ne signifie pas « innocent »… Et que toutes les avancées féministes ont été obtenues par des militantes qui ont bousculé l’ordre établi de domination masculine.
Retournement du stigmate
L’association « les Tricoteuses Hystériques » a dressé une liste non exhaustive : Olympe de Gouges, Hubertine Auclert, Simone Veil, Simone de Beauvoir, Angela Davis, Bell Hooks, Gloria Steinem, Tarana Burke, Gisèle Halimi, Virginia Woolf… Toutes des « sales connes »
Les féministes empruntent, une nouvelle fois, la seule voie rhétorique possible pour elles : le retournement du stigmate. D’innombrables messages ont fleuri sur les réseaux sociaux pour revendiquer le terme utilisé par Brigitte Macron pour désigner celles qui font bouger les lignes. L’actrice et réalisatrice Judith Godrèche a publié : « Moi aussi – je suis aussi une sale conne et je soutiens toutes les autres. » La chanteuse et actrice Camélia Jordana s’est photographiée avec #saleconne inscrit sur son front. La sénatrice écologiste Mélanie Vogel a souhaité: « Et une très bonne journée à toutes les connasses de notre pays »… Et ce ne sont que quelques exemples parmi des milliers !
Les militantes rappellent aussi combien il est désespérant de voir une femme, qui a bénéficié des combats féministes, taper sur ses protectrices. Au passage, elles ont toujours défendu Brigitte Macron face à de stupides et odieuses accusations prétendant qu’elle serait un homme…
Indignation nuancée et déni
Aujourd’hui, il se trouve bien peu de monde pour défendre l’épouse du chef de l’État. Même si l’indignation connaît des nuances. Les militantes dénoncent l’insulte faite aux féministes et à la cause des femmes, mais les hommes sont davantage chiffonnés par la grossièreté du propos.
L’entourage de Brigitte Macron a, en un premier temps, fait savoir que c’étaient les méthodes des militantes qui la gênaient plus que leur combat… et ce mercredi matin surFrance 2, la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a demandé « qu’on laisse Brigitte Macron tranquille ». Selon elle, « ce qui est gravissime », c’est que ces femmes aient tenté d’interrompre la représentation « de quelqu’un qui avait bénéficié d’un non-lieu ». « Qu’est ce que ça signifie ? Ça signifie qu’au fond, la décision de justice n’aurait plus aucune importance », a-t-elle dit… Justement, c’est cette justice que les féministes veulent remettre en question.
Le mirage de la grande cause des quinquennats
De quoi enterrer définitivement la grande cause des deux quinquennats d’Emmanuel Macron… Une grande cause qui avait du plomb dans l’aile dès le début.
Lire : Grande cause nationale, petit budget ?
Et ça ne s’est pas arrangé au fil du temps. Dernier épisode qui ressort à l’occasion de cette nouvelle insulte faite aux féministes : quand Emmanuel Macron jugeait que Gérard Depardieu rendait « fière la France ». Il désavouait au passage sa ministre de la Culture de l’époque, Rima Abdul Malak, qui jugeait au contraire que l’acteur faisait honte à la France.
Lire : Immigration, violences sexuelles : Emmanuel Macron perd de vue la grande cause
Révélation cocasse après-coup : la vidéo, qui a fait le tour des médias et des réseaux sociaux, a été diffusée à la presse people à la suite d’une bourde de l’agence Bestimage, dont la patronne est Mimi Marchand, une proche de Brigitte Macron, selon des informations du Parisien confirmées mardi à l’AFP par Bestimage. Une amie au service du couple présidentiel qui n’a manifestement pas davantage compris la lutte contre les violences sexuelles…
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