La composition du lait maternel différerait selon le sexe du bébé ? La presse détourne, une fois encore, les conclusions d’une étude scientifique. L’auteure s’en insurge.
« Le lait maternel est différent pour les garçons et les filles ! » Ces derniers jours ce titre est apparu sur de nombreux sites d’information pour évoquer des travaux présentés vendredi 14 février.
Les articles, qui s’appuient à peu près tous sur une dépêche de l’AFP, enchaînent : « les petits garçons ont du lait plus riche en graisse et en protéines, donc énergétique, tandis que les petites filles obtiennent de plus grandes quantités de lait ». Et de citer Katie Hinde, biologiste de l’université de Harvard et principale auteure de l’étude : « Les mères produisent des recettes biologiques différentes pour un garçon et pour une fille ».
Voilà pour l’histoire médiatique. Mais la vérité est quelque peu différente… Et c’est Kate Hinde elle-même qui s’insurge contre les simplifications, voire les contre-vérités, qu’elle peut lire sur ses travaux.
Chez les singes et les vaches, pas forcément chez les humains
Elle se doit donc de rétablir la vérité sur son blog : « La ‘recette biologique’ du lait peut être différente selon le sexe du bébé chez certaines espèces, dans certaines circonstances. » Ce que la presse associe aux humains est en fait ce que les scientifiques constatent chez les singes rhésus. Et chez les vaches, pour ce qui est de la dernière étude, expliquée le 3 février par la biologiste.
Mais chez les humains « il n’existe que 5 études qui comparent le lait maternel pour les garçons et pour les filles. Et certaines montrent des différences, d’autres non. » Impossible, donc, de tirer des conclusions sur le lait maternel humain, insiste Kate Hinde, en dénonçant la tendance des médias à créer des titres pour faire du clic au détriment de la vérité – ou du doute – scientifique.
La biologiste salue toutefois une dépêche de l’agence AP (en anglais), qui colle bien davantage à la réalité de l’étude. Mais la presse française s’appuie quasi-exclusivement sur l’AFP et a donc repris à son compte cette approche biaisée.
C’est loin d’être la première fois en matière de « journalisme scientifique ».
D’autres études relatée sans recul dans la presse :
Partage des tâches et divorce : le mauvais titre de l’AFP (et des autres)
Photo par Peter Nijenhuis sur Flickr