« Le Sahel peut nourrir le Sahel », c’est la devise de l’ONG française Afrique Verte implantée au Mali, Niger et Burkina Faso. Alors que ces régions en pleine évolution privilégient les importations, Afrique Verte soutient la production locale de transformation de céréales africaines. Rencontre avec une entrepreneure, Siralde Ba, transformatrice malienne.
Dans son costume traditionnel chatoyant, ses longues nattes coulant sur ses épaules, Siralde Ba dégage une impression d’assurance et de sérénité. A 31 ans, elle est à la tête d’un collectif de transformatrices et a conscience de représenter une nouvelle génération de femmes africaines. « Nous ne pouvons pas rester à la maison comme nos mères, à piler les céréales dès le matin et à passer nos journées à préparer le repas. Aujourd’hui, nous travaillons à l’extérieur du foyer ».
Siralde Ba non seulement travaille, mais surtout a choisi son métier et ses responsabilités, avec l’aide d’Afrique Verte. En 2004, la jeune femme quitte son pays d’origine, la Côte d’Ivoire, pour suivre son mari au Mali. Grâce à son BTS en secrétariat de direction, elle obtient un stage à Bamako dans un bureau. « C’était très difficile pour moi, je me sentais emprisonnée ». C’est en regardant la télévision qu’elle découvre l’ONG. « Ce fut comme une révélation. J’ai senti que j’avais envie de créer ma propre entreprise ».
Du secrétariat de direction à la création d’entreprise
La jeune femme, déjà mère de trois enfants en bas âge, contacte Afrique Verte. Puis tout va très vite. Elle commence immédiatement son apprentissage, fonde une coopérative de transformatrices en 2005, obtient la reconnaissance officielle en 2006. Elles sont 14. Aujourd’hui, Siralde Ba emploie 27 salariées de tous âges et a inauguré son propre centre de formation. Audacieux, lorsqu’elle doit « enseigner la transformation agroalimentaire à des femmes de 50 ans qui cuisinent depuis l’âge de 12 ans ».
Son atelier, doté d’un séchoir à gaz (plus sain que le séchage des grains au soleil) et de quelques machines rudimentaires mais utiles, produit des petits sachets remplis de couscous ou de granulés de fonio, maïs, mil, arachides ainsi que de mangue séchée. Siralde les vend au marché local de Bamako, dans les boutiques et supermarchés, ou, lorsque la récolte est bonne, dans les bureaux au porte à porte. « Nous faisons tout, de l’achat des céréales à l’étiquetage », précise, fière, la jeune entrepreneuse, qui ne manque jamais de souligner sa reconnaissance envers Afrique Verte. « L’ONG organise des bourses de céréales pour qu’on rencontre nos producteurs, elle fournit nos ateliers en machines, nous aide à organiser le travail d’équipe, à distribuer nos produits, et à en faire la promotion ».
Militante de la consommation locale
Afrique Verte milite en effet pour la consommation locale au Sahel. Au Mali où la récolte des céréales est annuelle, la transformation agroalimentaire est nécessaire pour assurer la continuité de la production. Surtout, elle répond aux attentes des nouvelles générations. Les femmes, responsables de l’alimentation du foyer, travaillent davantage et n’ont pas le temps de cuisiner les plats traditionnels. Alors, elles se rabattent sur des produits importés précuits, bien que plus chers: pâtes, semoules, lait en poudre, conserves… La transformation de produits locaux protège ainsi l’économie malienne, le portefeuille des familles face à l’inflation des importations, et répond à ce besoin d’aliments rapides à cuisiner.
Pour les femmes, Siralde Ba voit un autre intérêt dans la transformation. « 60 à 80% des Maliennes sont analphabètes. Elles ne peuvent pas travailler dans les bureaux. Grâce à Afrique Verte, elles ont un travail et ne restent pas à la maison à s’occuper du ménage comme les anciennes générations ».
Siralde Ba vient de terminer une formation de trois semaines pour les femmes entrepreneures africaines à l’Ecole Nationale d’Administration à Paris qui lui a donné un nouvel élan. Sans perdre de temps, elle souhaite appliquer à son entreprise ce qu’elle a appris. « Je vais insister à mon retour au Mali sur l’organisation de l’équipe, pour être sûre de la garder à mes côtés. Le management existait déjà, mais de façon désordonnée. Après cette formation, j’aspire à l’ordre ».
Pas de doute que l’entreprise de Siralde continuera à fleurir. Mais elle conservera toujours une immense gratitude envers Afrique Verte.
Présentation d’Afrique Verte :