Inquiété par la justice pour des viols, celui qui prêche un islam radical prévoit de s’exprimer dans une grande salle en région parisienne. Des féministes protestent.
L’invitation circule largement : le 29 novembre prochain, Tariq Ramadan tiendra une conférence dans une salle de 1000 personnes à Saint-Germain-lès-Corbeil (Essone). Le titre de sa conférence le met d’emblée en posture de victime et de sauveur : « face à l’islamophobie et à l’injustice, résister avec foi et intelligence. » Mais ce n’est pas seulement le contenu de son prêche à venir qui dérange les féministes. Un court message de la militante Florence Humbert adressé à la mairie de Saint-Germain-lès-Corbeil par nombre de féministes dit très clairement les choses :
« Bonjour, j’apprends avec beaucoup d’inquiétude que le violeur présumé de nombreuses femmes et adolescentes en Suisse et en France, propagandiste d’un Islam radical et misogyne va tenir une conférence dans votre commune le 29.11.
Etant donnée l’influence néfaste que cette idéologie peut avoir sur la population de votre ville et en particulier sur la jeunesse, et la gravité des faits qui sont reprochés à Tariq Ramadan, la responsabilité de la municipalité est engagée. Je vous serais reconnaissante de faire annuler cet événement et de mettre en garde les élu.es des communes avoisinantes. Merci d’avance. »
Tariq Ramadam qui se présente comme un « islamologue suisse » est accusé de viols par cinq femmes. Deux d’entre elles décrivent des sévices sexuels terrifiants. Leurs plaintes ont entraîné la double mise en examen du prêcheur pour viol et viol aggravé, puis son incarcération du 2 février au 15 novembre 2018. Il a pu quitter la prison moyennant une caution de 300.000 euros assortie d’une interdiction de sortir du territoire français et d’une obligation de pointer chaque semaine au commissariat. Puis d’anciennes étudiantes Suisses du prêcheur ont aussi évoqué des viols sans porter plainte en raison des délais de prescription.
Depuis, Ramadan ne cesse de dénoncer «un tribunal populaire et médiatique » qui l’aurait condamné et de se dire « victime d’un traquenard». Il a bien sûr nié l’ensemble des faits qui lui étaient reprochés, en commençant par dire qu’il n’avait jamais eu de relations sexuelles extra-conjugales, avant de se rétracter sur ce seul point. Mais il persiste à dire que celles qui dénoncent les viols étaient consentantes.
A la rentrée, il a sorti un nouveau livre dans lequel il accuse les plaignantes de tous les maux. Lors d’une interview sur le plateau de BFM TV début septembre, il se dit « homme de paix » mais n’a pas de mots assez durs pour elles. Grand classique des agresseurs sexuels : il inverse les rôles. Les plaignantes ne sont, selon lui, que des femmes « jalouses » qui se sentent flouées, il va jusqu’à prétendre que, affirme-t-il : «La loi française est ma charia». Et il se permet de fixer les conditions dans lesquelles il daignera pardonner ces femmes (qui ne lui ont bien sûr rien demandé). BFM TV a réalisé une contre-enquête sortant notamment des textos du prédicateur d’une extrême violence.
Rappelons que celui qui prétend aimer les femmes a, par exemple, dans le passé, demandé un « moratoire » sur la lapidation quand des musulmans modernistes exigeaient l’abandon immédiat de cette pratique… Le 19 mars dernier, à Saint-Denis, il plongeait une salle de conférence en état de sidération en s’invitant à un débat sur le thème : « Lutter contre les violences envers les femmes au quotidien. »
Encore une fois, la liberté d’expression bénéficie à ceux qui utilisent le pouvoir de la parole contre les femmes. Plusieurs épisodes se sont succédé ces derniers jours mettant en scène des hommes disant aux femmes ce qu’elles devaient penser avec une grande variété d’inversions des rôles. (voir « ON NE PEUT PLUS RIEN DIRE !» QUAND FINKIELKRAUT PERD LE MONOPOLE DE LA PAROLE et POLANSKI : EST-CE LE DÉBUT DE LA FIN DE L’IMPUNITÉ TRIOMPHANTE ?)