En consacrant sa Une à un homme puissant, accusé de multiples viols, Paris Match le pose en victime et réactive l’omerta. En dépit d’un article sans indulgence pour PPDA. #MeToo n’aura donc pas fait changer les médias ?
La Une que Paris Match affiche fièrement dans les médias et sur les réseaux sociaux n’appartient pas au passé. Elle date du 7 avril 2022. Le magazine annonce qu’il consacre un long dossier à Patrick Poivre d’Arvor (PPDA), et à ce qu’il appelle « sa nouvelle vie de paria ». L’homme est photographié plutôt à son avantage, regardant l’objectif d’un air pénétré, libre dans la rue, seul et digne…
PPDA est visé par plusieurs plaintes pour viol et agressions sexuelles, depuis que plusieurs de ses victimes ont réussi à être entendues par des médias qui, jusqu’alors, faisaient la sourde oreille.
Lire PPDA ACCUSÉ, #METOOMEDIAS : LE 4ÈME POUVOIR MIS EN CAUSE
Même si le dossier de Paris Match ne semble pas l’excuser, le seul fait d’accorder autant de place, d’importance, d’intérêt à PPDA fait de lui une victime. Le message envoyé par cette Une livrée aux passant.es devant les kiosques à journaux est le même qu’avant la période #MeToo. L’inversion de culpabilité est à son comble avec l’utilisation du mot « paria » pour parler de PPDA. Ce sont les hommes puissants qui ont toujours fait de leurs victimes des parias si elles essayaient de parler. C’était très facile pour eux de faire régner l’omerta.
Avec cette Une, on se croirait revenu au début de l’affaire DSK, quand la presse française jouait le déni.
Lire L’AFFAIRE DSK ET L’OMERTA SUR LES VIOLENCES SEXUELLES repris dans The Guardian avec ce titre : Don’t let Dominique Strauss-Khan become the victim.
Quand l’écrivain et journaliste Adrien Borne (@AdrienBorne) écrit sur Twitter : « J’attends avec impatience une Une et un article de 4 pages sur ce que deviennent les femmes qui ont pris la parole avec courage ! Vous vous souvenez ? Vous vous souvenez de leur nom ? Ça ne fait sans doute pas vendre. Rien ne changera tant que le point de vue ne changera pas », une des accusatrices répond : « Monsieur je fais partie de ces femmes et je ne vais pas bien. Merci de penser à nous. »
L’une des accusatrices, Cécile Delarue a exprimé le mal-être provoqué par cette Une dans une série de tweest ici
La Une de Paris Match confirme le point de vue viriliste sur l’actualité des médias les plus puissants. En 2022, cinq ans après #MeToo, après l’immense courage des accusatrices de PPDA.
Lire aussi : « Journalisme de combat pour l’égalité des sexes. La plume dans la plaie du sexisme.