Attendue depuis plusieurs années dans l’agglomération clermontoise, une maison des femmes a ouvert ses portes ce lundi 18 décembre à Clermont-Ferrand. En hommage à la célèbre avocate et féministe, le 25•Gisèle Halimi se veut avant tout un lieu de répit pour les femmes.
Tout un symbole
Depuis l’extérieur, son portrait trône fièrement. Le nom de Gisèle Halimi s’est imposé comme une évidence à l’heure de nommer ce lieu puisque celui-ci enfourche plusieurs combats menés par l’avocate franco-tunisienne.
Tout d’abord le droit à l’avortement avec la présence du Planning Familial 63 et d’un centre de santé où les femmes et les filles peuvent avoir recours si besoin à un avortement médicamenteux. Avec la présence de l’association A.V.E.C-France Victimes 63 et son accueil de jour pour les femmes victimes de violence, on y retrouve notamment la bataille menée par Gisèle Halimi pour la reconnaissance du viol comme un crime, combat porté lors du célèbre procès d’Aix-en-Provence. Sans oublier non plus tous les autres combats sociaux menés et les injustices contre lesquelles s’est battue l’avocate tout au long de sa vie.
Quant au numéro, le 25 représente bien entendu le 25 novembre, journée internationale des violences faites aux femmes. Le hasard faisant bien les choses, le 25 se trouve être également le numéro administratif du bâtiment ! (Infos pratiques à la fin de l’article).
Les prémices
Le 25•Gisèle Halimi est un lieu important dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles à Clermont-Ferrand. Il offre un soutien et des ressources aux femmes victimes de violences, ainsi qu’un lieu de sensibilisation et de prévention pour toutes les femmes. Annoncé dans le programme électoral du maire actuel Olivier Bianchi (PS), lors des dernières municipales, ce projet est l’aboutissement d’un travail de plus de deux années. En 2019, lors du Grenelle des violences conjugales qui s’était tenu à Clermont-Ferrand, la préfète de l’époque, Mme Anne-Gaëlle Baudouin-Clerc, avait souhaité donner la parole aux concernées. Toutes s’étaient accordées pour dire que s’il existait certes des numéros d’urgence, des associations d’aides etc., il n’était pas toujours simple de savoir à quelle porte frapper. Avec le 25•Gisèle Halimi, la ville de Clermont-Ferrand répond ainsi au besoin de créer un lieu unique où les femmes n’auraient qu’une seule porte à pousser pour accéder à des conseils ou entamer leurs demandes d’aide et/ou d’accompagnement, s’évitant ainsi de multiples démarches et déplacements.
Un accompagnement de chaque instant
Responsable de la Mission égalité des droits à la Mairie de Clermont-Ferrand, Karine Plassard raconte qu’après avoir réalisé un état des lieux sur le territoire clermontois, elle et son équipe se sont attelées à identifier ceux qui deviendraient les opérateurs permanents sur le site. Elle explique ainsi les raisons qui les ont naturellement poussées à faire le choix de trois entités : « L’accueil de jour de l’association A.V.E.C 63 a pour mission d’accompagner les femmes victimes de violences dans leur parcours de sortie. Ensuite, face à la pénurie de médecins, la nécessité d’un accès aux soins gynécologiques, d’un suivi des personnes en parcours de transidentité ou encore la question de l’accès à l’avortement il nous a semblé évident d’accueillir le Planning Familial 63 et le centre de santé. L’équipe du Planning avait déjà en tête cette envie de créer un centre de santé mais leurs locaux étaient trop petits pour un tel projet. Quant à la présence du CDIFF 63, cela apporte au lieu une vision plus généraliste mais avec une spécificité sur l’insertion socio-professionnelle. Enfin, concernant notre équipe de la Mission égalité des droits nous sommes présentes pour assurer un accès à l’information et un accueil général des femmes.»
A.V.E.C-France Victimes 63, le Planning Familial 63 et le CIDFF 63 (Centre d’Information des Droits des Femmes et des Familles) : trois entités pour un accompagnement différent selon les besoins de chaque femme. C’est toutes ensemble qu’elles ont alors constitué un groupe de travail : « A partir de là, nous avons identifié huit axes de travail que nous souhaitions suivre et s’en est suivi un travail de concertation et de co-construction du projet d’établissement avec une soixantaine de partenaires qui viendront participer à la vie du 25•Gisèle Halimi, en proposant des permanences ou des actions collectives à destination des femmes.»
En parallèle, un travail a été mené avec l’architecte en charge du bâtiment pour conceptualiser le site autour des valeurs de quiétude. Tout a été pensé dans les moindres détails pour le bien-être des femmes. Proposer un accueil agréable, un environnement aux couleurs chaudes, des cabinets médicaux pensés efficacement, un espace de repos pour les femmes, une bibliothèque ou encore des espaces jeux pour les enfants étaient des indispensables pour cette maison des femmes clermontoise.
Lors de la visite des locaux, Marie Costenoble, coordinatrice égalité de genre à la Mission égalité des droits, expliquait qu’une mère de famille pourra par exemple bénéficier d’un entretien privé avec une professionnelle de santé tout en ayant un oeil, à travers une vitre, sur son ou ses enfants qui joueraient dans l’espace dédié attenant à la pièce où elle se trouve. Un vrai soulagement pour celles qui n’ont pas d’autres choix que d’effectuer des démarches avec leurs enfants.
Des débuts encourageants pour ce lieu unique
Dès le premier jour, le 25•Gisèle Halimi a été très sollicité avec des orientations téléphoniques, des accueils sur et sans rendez-vous, mais aussi la présence de jeunes de la Mission Locale. Marie et ses collègues se réjouissent de cette première journée d’ouverture : « Nous avons eu des retours très positifs tant sur le lieu en lui-même (accueil, agencement) que sur les services proposés. C’est très encourageant pour la suite. »
Pour ce qui était de créer un lieu unique avec une seule porte d’entrée permettant d’en ouvrir des tas d’autres, l’engagement a été pleinement respecté. En accompagnant sa fille à un rendez-vous à A.V.E.C 63, cette maman a été agréablement surprise de découvrir que les locaux du Planning Familial 63, dans lesquels elle se rend régulièrement, étaient désormais basés ici : « Plus besoin de courir partout, nous pouvons désormais tout faire dans un seul et même endroit ». De la même manière, des grands-parents qui accompagnaient leur petite-fille chez une psychologue ont été ravis de découvrir les espaces de pause, bibliothèque leur permettant, en tant qu’accompagnants, de patienter au sein d’un espace calme et chaleureux.
Des projets en préparation
Accueil, écoute, informations, accompagnement, le 25•Gisèle Halimi semble remplir toutes ses promesses et ne compte pas s’arrêter là. Au-delà des missions principales des forces opératrices en présence régulière sur le site, le lieu a vocation d’accueillir de nombreux autres projets. Karine Plassard en a dévoilé quelques-uns, en cours et à venir.
Le premier objectif de la Mission égalité et des trois associations qui font vivre ce lieu sera tout d’abord d’organiser un calendrier avec les opérateurs ponctuels (partenaires) pour voir quand et à quel rythme ils/elles souhaitent intervenir au 25•Gisèle Halimi.
Une action significative est d’ores et déjà prévue sous la forme d’un partenariat avec le Tribunal d’Instance et le CDAD (Conseil Départemental de l’Accès au Droit) pour bénéficier de permanences sur le lieu de la plateforme juridique VIF (Violences Intra Familiales). Grâce à ce dispositif, il sera possible de rencontrer des professionnel·es des métiers du droit comme des avocat·es, huissier·es, conciliateur·ices de justice etc. pour recevoir des conseils et/ou entamer si besoin des démarrages d’accompagnement de parcours.
Un rendez-vous récurrent : le Balabule se tiendra une fois par mois. Il s’agit d’un café des mamans, notamment pour les mères isolées mais pas seulement. Ce dispositif sera l’occasion pour celles-ci de trouver un peu de répit et de discuter avec d’autres adultes, d’échanger aussi sur des difficultés ou simplement faire une pause.
Des permanences avec des assistantes sociales spécialisées dans les relations intrafamiliales se tiendront au 25·Gisèle Halimi et un travail avec l’association CeCler est également envisagé, notamment pour aider les femmes à sortir de la prostitution.
La Mission égalité des droits n’oublie pas non plus l’aspect culturel qu’elle souhaite donner au lieu et travaille déjà sur une programmation qui accueillera en 2024 des expositions, conférences ou encore des spectacles.
Inauguration
Symboliquement, le 25•Gisèle Halimi a été inauguré le samedi 25 novembre 2023, lors de la journée internationale des violences faites aux femmes. Plusieurs personnalités étaient présentes et réunies à l’occasion d’un week-end riche en échanges et activités.
En savoir plus sur ce week-end inaugural.
Lors de cette inauguration, l’engagement féministe de la ville de Clermont-Ferrand* a notamment été salué par la sénatrice socialiste et ancienne ministre des droits des femmes :
« S’il existait un label de ville féministe, il reviendrait à Clermont-Ferrand ! ».
Laurence Rossignol
Pour elle, ce 25•Gisèle Halimi est sans nul doute « la plus belle, la plus grande et la plus moderne » des maisons des femmes qu’elle a été amenée à visiter.
* (Lire aussi : On ne tue jamais par amour : l’autre Saint Valentin)
Après plus de deux ans d’investissement et de travail sur ce projet, ce sont les larmes aux yeux et très émues que les membres du service de la Mission égalité de la ville et les associations voient le rideau noir tomber, dévoilant ainsi sous de nombreux applaudissements la façade de ce lieu tant attendu.
Réalisé par le graffeur clermontois Keymi, le portrait géant de Gisèle Halimi, apparaît majestueusement dans le paysage clermontois et les femmes présentes entonnent à l’unisson l’hymne des femmes. Un moment riche en émotions !
En savoir plus sur le 25•Gisèle Halimi
