Fidèles au poste, les aides à domicile n’ont pas été récompensées pour leurs efforts pendant la crise sanitaire. Encore un métier « de femmes » donc pas valorisé.
En première ligne avec les « soignant.e.s », les aides à domicile sont aussi les oubliées de la prime promise à celles et ceux qui ont été au front dans la lutte contre le coronavirus. Elles devaient recevoir cette prime comme leurs collègues des Ehpads et nombre de soignant.e.s. Mais de sombres tractations politiques ont renvoyé l’idée aux oubliettes. L’annonce de la prime avait été faite par le Premier ministre mi-avril mais, les services d’aide à la personne étant financés par les départements, il leur appartenait d’en décider et de mettre en place la mesure. Un accord avec les départements a été trouvé pour le personnel des Ehpads mais pour les aides à domicile, l’idée est restée dans le flou et laissée au bon vouloir des départements.
Hugues Vidor, directeur général de la fédération d’aide à domicile Adedom, demande que la prime soit

Hugues Vidor – DR
versée par l’Etat et non par les départements. Il bataille depuis des années pour valoriser le statut de ces aides à domicile. Elles représentent 228.000 salarié.e.s. et 97 % des aides à domicile sont des femmes. « Elles font un travail remarquable, indispensable. Elles ont assuré pleinement leur mission pendant la crise. Très peu n’ont pas répondu à l’appel. » indique-t-il. Et pourtant, comme beaucoup de ces « soldates du care », elles devaient partir au front avec le glaive mais sans le bouclier. Elles ont été les dernières servies pour les masques, blouses et autres protections indispensables. Elles sont passées après les personnels des Ehpads qui ont, eux-mêmes, dû attendre longtemps avant de disposer de ces protections.
Elles ne bénéficient pas des plans mis en place par le gouvernement. Ni lorsqu’il est question de revaloriser le secteur de la santé, ni dans les plans d’aide à différents secteurs touchés par la crise comme l’automobile, le tourisme ou l’aéronautique…
Hugues Vidor veut que, dans les lois qui seront prises au sortir de la crise, soit intégrées des dispositions améliorant le statut des aides à domicile dans une société qui en aura de plus en plus besoin : la population de plus de 85 ans va être multipliée par 3,2 entre 2017 et 2050. La demande d’aides à domicile va devenir de plus en plus forte. « Et si le métier reste difficile et très mal payé, il y a peu de chance qu’on attire du monde et on risque de devoir faire face à une pénurie de professionnel.les. Il y a urgence à valoriser ce secteur d’activité » dit-il.
Le recul de la crise sanitaire ne devra pas faire oublier la réflexion qui s’est esquissée sur la valeur sociale des métiers. Comme dans toutes les professions exercées majoritairement par des femmes, les batailles pour l’amélioration du statut d’aide à domicile ne sont pas nombreuses, ni violentes. Pas de routes bloquées, de pneus brûlés, ou de purin versé devant des préfectures. Les femmes ont été éduquées pour se dévouer aux autres, elles ont du mal à faire passer leurs intérêts avant ceux des autres. Mireille Journot qui est auxiliaire de vie à domicile en région parisienne est étonnée quand on lui demande pourquoi il n’y a pas davantage de mouvements sociaux dans sa profession. « Les personnes dont nous nous occupons ont besoin de nous, nous ne pouvons pas nous mettre en grève. Et puis ce serait difficile de mener des actions collectives car nous sommes éparpillés chez les personnes dont nous nous occupons »
Éternelles difficultés des femmes à revendiquer des droits. Ce sont souvent, même dans les professions très féminisées, les rares hommes du métier qui sont les porte-paroles ou représentants syndicaux. Chez les infirmier.es, beaucoup d’hommes, représentants syndicaux , se sont exprimés pendant la crise. Si les décideurs ne valorisent les métiers que lorsqu’il y a un rapport de force, c’est mal parti pour les aides à domicile.