Les femmes sont plus diplômées que les hommes mais, dès le début de leur carrière, les postes qui leur permettraient d’acquerir un « capital d’expérience » leur échappent. Ce premier « échelon brisé » éloigne toujours les femmes des postes de pouvoir.
L’évolution professionnelle des femmes est semée d’embûches. Si quelques femmes sont parvenues à briser le plafond de verre dans leur milieu, elles restent des exceptions. La raison ? « L’échelon brisé » qui empêche une majorité de femmes d’accéder à leur première promotion. C’est ce qu’avance Kweilin Ellingrud, Lareina Yee et Maria del Mar Martinez, associées seniors du cabinet de conseils McKinsey, dans leur livre The Broken Rung (éd Harvard Business Review Press).
Première promotion déterminante
« Pensez à une échelle de carrière comme à une échelle littérale. Vous atteignez le premier échelon, le deuxième échelon, le troisième échelon. Vous travaillez pour atteindre le sommet, raconte Lareina Yee, avant de préciser : Le défi pour les femmes est qu’elles tomberont dès le début. Les chances sont contre vous. Le plus grand obstacle n’est pas le plafond de verre, car les chances d’atteindre ce plafond et de le briser sont en fait très rares ». En Amérique du Nord, les femmes représentent 48 % des employé.e.s de premier niveau, c’est-à-dire l’échelon le plus bas de l’échelle salariale. Lors de la première promotion à un poste de direction, la part de femmes chute à 39 %. « Les femmes n’obtiennent pas cette promotion. Elles passent à travers les mailles du filet et ne sont pas en mesure de franchir la première étape, l’étape suivante, vers la promotion. », déplore Kweilin Ellingrud.
Les choix faits par les femmes au début de leurs carrières seraient déterminants selon les consultantes, qui s’appuient sur une décennie d’observations des carrières féminines où elles ont constaté que « le moment où l’on perd un grand nombre de femmes, c’est lors de la première promotion. […] Personne ne voit ces femmes qu’on perd, or cela a un impact sur toute la suite de leurs carrières ». Résultat : au moment d’accéder aux fonctions les plus élevées, les candidates sont minoritaires.
« Les femmes veulent devenir des leaders »
Comment expliquer ces inégalités alors même que les femmes sont aujourd’hui davantage diplômées que les hommes ? « Environ la moitié de vos revenus proviennent de l’éducation et des compétences que vous avez acquises lors de votre premier emploi. Mais l’autre moitié, en moyenne, est basée sur les compétences que vous avez acquises dans cet emploi ou dans des emplois multiples, détaille Kweilin Ellingrud et précise : Les femmes ne recevaient pas leur juste part de la seconde moitié de ce “capital expérience“ ».
C’est l’autre concept phare de cette étude : « capital d’expérience ». Pour Lareina Yee, « ce concept de capital d’expérience est une incroyable lueur d’espoir parce que, normalement, les gens disent : « Le niveau d’éducation que j’ai pu atteindre prédétermine en quelque sorte mon potentiel ». L’une des choses que nous savons, c’est que les femmes sont ambitieuses sur le plan professionnel. Elles veulent devenir des leaders. Et dans tous les travaux que nous avons réalisés au cours des dix dernières années, nous constatons que les femmes sont aussi ambitieuses que les hommes pour s’élever. Mais elles ne doivent pas se sentir limitées par là d’où elles viennent »
Bien que les femmes représentent 59 % des diplômé.es de l’enseignement supérieur, elles disparaissent au moment de l’entrée sur le marché du travail et ne sont plus que 48 % des nouveaux entrants. Pour contrer ces inégalités et les réflexes intériorisés, les autrices insistent sur la nécessité pour les femmes de « construire les compétences qui serviront leur avenir professionnel, en particulier dans les domaines technologiques, mais aussi chercher des soutiens en se dotant d’un réseau et en choisissant le bon employeur ».
Cette nouvelle enquête de McKinsey pointe un des obstacles structurels qui pèsent sur les femmes dans le milieu professionnel. Plafond de verre, falaise de verre, plancher collant, échelon brisé… Il est temps de faire exploser la bulle dans laquelle les femmes sont contenues pour mettre en place une véritable égalité professionnelle.
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