Pour l’économiste Hélène Périvier, « un congé paternité obligatoire et plus long rééquilibrerait entre les deux parents l’impact d’une naissance sur la carrière ».
Pour réduire les inégalités professionnelles, renforcer le rôle du congé paternité : c’est la piste développée par l’économiste Hélène Périvier, dans une note de l’OFCE (Observatoire française des conjonctures économiques) publiée vendredi 13 janvier.
Les femmes en France effectuent encore plus des deux tiers des tâches ménagères et parentales (respectivement 71% et 65%). Et, « contrairement aux hommes, elles ajustent leur carrière aux contraintes de la vie familiale, surtout en présence de jeunes enfants. Les interruptions d’activité sont plus fréquentes pour elles que pour les hommes et 80 % du temps partiel est pourvu par des femmes », rappelle Hélène Périvier.
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Une piste pour réduire ces inégalités consiste à modifier la répartition du temps consacré aux enfants entre femmes et hommes, souligne l’économiste. « D’un ‘risque maternité’ qui pèse sur toutes les femmes actives, on passerait à un ‘risque parentalité’ qui pèserait sur les parents, mais qui aurait le mérite de ne plus être sexué ».
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La réforme française du congé parental adoptée en 2014 était « davantage motivée par la restriction budgétaire que par l’égalité. La répartition du travail dans la famille a peu de chance d’en être changée », souligne Hélène Périvier, qui propose cette fois d’agir sur le levier du congé paternité.
Pour la spécialiste du marché du travail, des inégalités entre les sexes et des politiques sociales et familiales, « un congé paternité obligatoire et plus long rééquilibrerait entre les deux parents l’impact d’une naissance sur la carrière. Associé à l’expansion des structures d’accueil de la petite enfance, il orienterait les politiques familiales vers l’objectif d’égalité. »
Trois scénarios
Déjà la délégation aux droits des femmes du Sénat, début 2013, avait proposé de rallonger le congé paternité et de le rendre obligatoire. Et Hélène Périvier évoquait déjà l’idée auprès des Nouvelles NEWS en 2011.
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L’idée n’est donc pas nouvelle, mais elle est toujours restée jusque là à l’état d’idée. En Italie aussi, elle vient d’être relancée – et aussitôt contestée.
Dans sa note, Hélène Périvier avance trois scénarios possibles :
1/ Le congé de paternité actuel de 11 jours calendaires, actuellement facultatif avec un taux de recours à 68%, devient obligatoire. Cela occasionnerait un coût supplémentaire pour les finances publiques de 129 millions d’euros (pour un coût total de 403 millions d’euros) ;
2/ Le congé paternité devient obligatoire et sa durée est doublée, passant à 22 jours calendaires. Le coût supplémentaire serait alors de 532 millions d’euro, pour un coût total de 806 millions d’euros ;
3/ La durée du congé paternité obligatoire est alignée sur celle du congé maternité obligatoire post-natal de 6 semaines (soit une durée quasiment quadruplée, de 42 jours calendaires), pour un coût supplémentaire de 1,26 milliard d’euros. Ce qui porterait le coût du congé paternité à 1,54 milliard d’euros.
À l’un de ces trois scénarios pourrait s’ajouter la possibilité pour la mère de transférer une partie du congé maternité post-natal au père, ajoute Hélène Périvier. Une mesure qui, elle, serait neutre pour les finances publiques.
À noter que le troisième scénario de l’économiste se retrouve chez l’un des candidats à la primaire de la gauche. Parmi ses propositions sur l’égalité femmes-hommes, Benoît Hamon propose d’aligner le congé paternité sur le congé post-natal dont bénéficient les mères. Un autre candidat évoque la question : Manuel Valls, qui propose de « partager le congé parental dans les couples », mais sans plus de précision. À droite, le programme du candidat à la présidentielle François Fillon ne propose aucune mesure liée au congé parental ou paternité.
