Deux sondages font d’Anne Sinclair la femme de l’année. Et les commentateurs d’y voir un vibrant hommage. Il s’agit davantage d’un effet du matraquage médiatique dont elle a été l’objet. « Consternant », dit Eva Joly.
Ce sera sans doute un des sondages les plus commentés de la semaine. Une enquête de l’institut CSA pour Terrafemina, publiée lundi 19 décembre, fait d’Anne Sinclair la « femme de l’année » en France. Dans le magazine Grazia, qui a fait voter ses lectrices, elle est « l’héroïne de l’année »
« Sa ténacité et son soutien sans failles » à son mari lui valent cette distinction, explique le site Terrafemina. Avec 25% des sondés Anne Sinclair « est suivie de très près dans le classement par Christine Lagarde (24%), dont la nomination à la tête du FMI, même si elle est due au départ précipité de Dominique Strauss-Kahn après l’affaire Nafissatou Diallo, suscite l’admiration », écrit encore Terra Femina. Derrière les femmes de l’année, décidément, l’ombre de DSK. Martine Aubry, avec 23%, vient compléter le trio de tête.
Réagissant à ce sondage sur i-Télé lundi matin, Eva Joly le jugeait« consternant ». A vrai dire, il n’est pas le premier à envoyer un tel message. En septembre, un autre sondage publié par VSD mettait également en avant la « bonne image » de la femina dolorosa Anne Sinclair. « Femme courage », titrait le magazine. L’institut CSA reprend le même qualificatif, plus parlant encore : elle est « la figure de la femme courage présente au côté de son mari dans la tourmente ».
« Celles qui ont le plus fait parler d’elles »
Le plus consternant, ce ne sont pas les résultats du sondage ; ce sont les extrapolations qui en sont faites. Car la question posée par le CSA était celle-ci : Quelle est la femme qui vous a le plus marqué en 2011 ?
Et ce que les commentateurs semblent oublier, c’est qu’on peut être marqué négativement. Choisir le nom d’Anne Sinclair sans vouloir rendre pour autant l’« hommage au courage » que distingue le CSA. Choisir celui de Christine Lagarde sans « admiration ».
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Décidément, un sondage révèle les opinions des personnes interrogées, mais aussi de celles qui interrogent. Ici, les sondés avaient à choisir parmi une liste de 10 noms pré-déterminée par l’institut CSA : Anne Sinclair, Christine Lagarde, Martine Aubry, Marine Le Pen, Eva Joly, Carla Bruni-Sarkozy, Tristane Banon, Audrey Pulvar, la réalisatrice Maïwenn et la chanteuse Nolwenn Leroy.
Mais comment donc ces dix noms ont-ils été retenus ? « En observant nos revues de presse de l’année. L’idée n’étant pas de distinguer les femmes les plus populaires, mais celles qui ont le plus fait parler d’elles en 2011», explique Bernard Sananès, président de CSA.
C’est donc bien cela. La femme de l’année n’est pas forcément la plus remarquable, mais celle qui a fait le plus parler d’elle. Le système tourne à vide : les médias matraquent l’opinion qui confirme ensuite dans un sondage qu’elle a bien vu les personnages mis en vedette.
On peut s’interroger sur l’absence dans cette liste, par exemple, d’Irène Frachon, la lanceuse d’alerte par qui le scandale du Mediator est arrivé. Pas assez courageuse ? Pas assez battante ? Pas assez médiatique, sans doute.
Et l’on peut ré-écouter François Morel