
Peu de chercheuses aux postes à responsabilité ? Une étude menée pendant deux ans auprès des jurys du CNRS met en évidence les biais sexistes qui freinent les femmes.
Les jurys du CNRS donnent-ils autant de chance aux femmes qu’aux hommes d’être promus chercheurs ou chercheuses ? Non, selon une étude publiée le 26 août. La rigueur de ces jurys se fracasse sur des biais sexistes que certains jurés veulent ignorer. Une étude des scientifiques du Laboratoire de psychologie sociale et cognitive (CNRS/Université Clermont Auvergne), du Laboratoire de psychologie cognitive (CNRS/Aix-Marseille Université), et de l’Université de British Columbia (Canada), avec le soutien de la Mission pour la place des femmes du CNRS, publiée dans la revue Nature Human Behaviour le démontre. Cette étude a analysé pendant deux ans 40 jurys chargés d’évaluer les candidatures aux postes de directeur ou directrice de recherche du CNRS. 414 personnes au total, ont répondu à des questionnaires pendant les pauses des jurys.
Aujourd’hui, le pourcentage moyen de chercheuses est de 35 % toutes disciplines confondues. Ce pourcentage diminuant à mesure que l’on s’élève dans la hiérarchie : chez les directeurs de recherche, statut le plus élevé dans l’institution, la proportion de femmes tombe à 29%.
Comme dans le reste de la population, « les scientifiques, hommes et femmes, associent pour la plupart « science » et « masculin » dans leur mémoire sémantique (la mémoire des concepts et des mots). Ce stéréotype est implicite, c’est-à-dire que, le plus souvent, il n’est pas détectable au niveau du discours» dit l’étude. Ce phénomène joue par exemple fortement dans l’orientation des élèves, il en va de même pour les carrières des scientifiques.
Quand le stéréotype fait son travail de sape, un jury scientifique sur deux minimise l’existence de biais en défaveur des femmes, tels que l’altérité biologique, les différences supposées en matière de motivation ou de compétence, l’autocensure et les contraintes familiales. Et surtout, plus ces stéréotypes implicites sont forts, et moins les femmes sont promues à l’issue des concours.
Mais, la bonne nouvelle de cette étude est que, « lorsque les jurys admettent la possibilité d’un biais, les stéréotypes implicites, quelle que soit leur force, n’ont plus aucune influence. »
Alors la principale recommandation des auteur.e.s de l’étude est de former ces jurys pour qu’ils prennent conscience de ces biais et les éliminent.
La Mission pour la place des femmes du CNRS incite déjà les membres des jurys à suivre une formation sur les stéréotypes de genre. Elle l’évoquait lors de son colloque « Intégrer la dimension de genre et de sexe dans la recherche scientifique » du 16 avril dernier