Le gouvernement, en partenariat avec la RATP et la SNCF, lance une vaste campagne de sensibilisation contre le harcèlement sexiste et les violences sexuelles dans les transports. A coups d’affiches et de slogans chocs, il compte bien réveiller les consciences.
« Tu sais que t’es bonne ? Je vais te serrer. Réponds, sale chienne ». Une affiche qui dépeint la réalité des victimes de harcèlement, dans les transports notamment, et espère changer les mentalités :
« Le quotidien des femmes ne doit pas ressembler à ça ».
« Ce sont des mots parfois crus mais qui sont ceux des agresseurs », a insisté Pascale Boistard, secrétaire d’Etat chargée des Droits des femmes, qui présentait avec Alain Vidalies, chargé des Transports, cette vaste campagne de sensibilisation lancée lundi 9 novembre. Elle fait partie des douze mesures phares contre le harcèlement sexiste et les violences sexuelles dans les transports présentées le 9 juillet dernier.
Très pédagogique, la campagne déclinée en affiches et panneaux numériques « vise à faire évoluer les comportements pour qu’aucune agression ne soit banalisée ou ignorée. L’objectif est de donner à chacun et chacune des outils pour réagir », explique Pascale Boistard, avant de remercier les associations qui ont « structuré cette méthode collégiale ». Les éléments de la campagne sont également disponibles sur une page internet du ministère des Droits des femmes.
« Vous n’êtes pas coupable : aucune tenue, aucune attitude ne justifie le harcèlement »
« C’est un premier pas, on est assez fières d’avoir participé au dialogue », témoigne Olga Volfson du collectif Stop Harcèlement de Rue. « On regrette un peu qu’à Paris les affiches ne soient visibles que 10 jours, même si les messages sonores, eux, seront pérennes. Il aurait été préférable que cette campagne soit permanente ». Car elle se terminera le 19 novembre et sera relayée pour 6 mois par des collectivités. Mais Olga Volfson se veut optimiste : « La campagne est en plusieurs étapes, nous en sommes à la deuxième, nous misons nos espoirs dessus. Ce n’est que le début ».
En attendant, Pascale Boistard tape du poing sur la table : « Nous le disons aujourd’hui, ça suffit ! (…) N’attendons plus pour réagir ». Il s’agit donc avant tout de réveiller les consciences, de « protéger les victimes et dissuader les agresseurs », souligne Alain Vidalies.
Le premier volet de la campagne est destiné aux victimes de harcèlement. « Vous n’êtes pas coupable : aucune tenue, aucune attitude ne justifie le harcèlement » explique l’affiche. Et la secrétaire d’Etat des Droits des femmes d’appuyer : « Vous n’êtes pas seules ! ». Le but : déculpabiliser les victimes trop souvent silencieuses, libérer leur parole, les aider à dire « non » grâce à des outils pédagogiques précis. « Le fait de mettre dans le métro un panneau qui dit que le harcèlement est une faute, un délit, une agression, fait qu’on va se sentir plus en sécurité et plus légitime à en parler, à dire non, à poser ses limites » expliquait Alice Barbe du collectif Stop harcèlement de rue aux Nouvelles NEWS en juillet dernier. Et Pascale Boistard d’ironiser :
« Au-delà de l’aspect juridique, c’est un devoir moral »
Mais justement, toutes les victimes n’osent pas dire « non » car, comme l’explique le gouvernement : « la victime peut être paralysée, tétanisée, elle ne peut ni crier, ni même émettre le moindre son ou parole. C’est ce qu’on appelle la sidération ». A cet égard, la campagne veut sensibiliser les témoins, eux aussi trop souvent silencieux comme le rappelle cette récente agression : « J’aimerais vous dire que tout le wagon s’est levé d’une seule et même voix pour protéger cette femme », racontait sur Facebook « Debbie Deb », témoin d’une agression sexuelle.
Voir : Agression sexuelle dans un train : ‘Bah, elle est pas morte !’
Une autre série d’affiches donnent donc les clefs aux témoins pour réagir : « Nous pouvons tous intervenir, grâce à quelques réflexes de base et de gestes simples ». Ainsi, le gouvernement préconise notamment d’aller « demander à la personne en difficulté si elle a besoin d’aide » ou encore de faire diversion mais surtout « d’impliquer d’autres passagers » car « à plusieurs on est plus fort ». « Si tout le monde agit, on peut espérer changer notre société ». Pascale Boistard précise : « Au-delà de l’aspect juridique, c’est un devoir moral. Nous n’avons pas tous vocation à être des super-héros ou super-héroïne mais il faut agir en solidarité ».
Légitimer la parole de la victime, inciter à agir, et rappeler que la loi punit le harcèlement sexiste : une première étape de cette campagne, qui rappelle également les différents outils annoncés par le gouvernement en juillet dernier. Comme le lancement, une semaine plus tôt à Nantes, de l’expérimentation de l’arrêt des bus à la demande la nuit. Ou la déclinaison par SMS des services d’alertes téléphoniques (le 3117 pour la SNCF et le 3224 pour la RATP). Ce nouveau système sera effectif le 7 décembre via le 31 117. « Qu’on soit victime ou témoin, envoyer un texto est parfois plus pratique », souligne Elisabeth Borne, présidente de la RATP.