Après avoir affirmé que l’avortement représentait «52 % des décès dans le monde» au cours d’une émission en partenariat avec France catholique, la chaîne du groupe Bolloré Cnews confie à une de ses journalistes, Laurence Ferrari, le soin de présenter des excuses.

Moment exceptionnel lundi 26 février : CNews, la chaîne du groupe Bolloré mainte fois dénoncée pour désinformation et propos haineux, a présenté des excuses après avoir atteint un sommet.
Manipulation de chiffres
Dimanche 25 février, son émission «En quête d’esprit», réalisée en partenariat avec France catholique (groupe Bolloré) présentait l’interruption volontaire de grossesse (IVG) comme la plus grande «cause de mortalité» dans le monde. Une infographie était même affichée à l’écran appuyant les dires du présentateur de l’émission affirmant : « En 2022, il y avait 234 300 avortements enregistrés en France. C’est aussi la première cause de mortalité dans le monde, selon l’institut Worldometer : 73 millions en 2022, soit 52 % des décès. Pour le cancer, c’est 10 millions ; et pour le tabac, c’est 6,2 millions » (Worldometer, n’associe bien évidemment pas IVG et taux de mortalité).
Cette séquence se déroulait alors que la perspective de l’inscription de l’IVG dans la constitution est assombrie par des sénateurs conservateurs.
Bronca sur les réseaux sociaux. Et un appel à faire des signalements à l’Arcom (ex CSA) a été lancé par @Sleeping Giants FR, Collectif citoyen de lutte contre le financement du discours de haine. qui explique ci-dessous comment procéder en se connectant sur le site de l’Arcom.
Le malaise a été assez rapidement palpable puisque l’émission était invisible en replay sur le site de Cnews, et le podcast de l’émission sur le site d’Europe 1 -radio appartenant aussi au groupe Bolloré-, a été écourté du passage sur les chiffres.
Excuses étayées
Il a fallu attendre lundi 26 février en fin d’après-midi pour que la journaliste de Cnews, Laurence Ferrari, monte au front et présente des excuses pour « une erreur qui n’aurait pas dû se produire ». Même s’il eut été plus juste de parler de manipulation que d’erreur, la journaliste a étayé son propos : «Ce sont des données incomparables» a-t-elle rappelé. «Il est absolument impossible de comparer ces chiffres et de les mettre en miroir de ceux de la mortalité liés au cancer ou au tabac».
La loi autorisant l’interruption volontaire de grossesse est en vigueur depuis 1975 en France a-t-elle rappelé. «Il s’agit donc d’un droit garanti par la loi et il ne s’agit pour quiconque de le remettre en cause. La chaîne Cnews présente ses excuses à ses téléspectateurs», a-t-elle affirmé sans ambiguïté. «Cnews présente ses excuses auprès de toutes les femmes, avec une pensée toute particulière à celles qui luttent dans le monde pour obtenir le droit à disposer de leur corps et à toutes celles qui ont perdu la vie faute de pouvoir accéder à l’IVG», a assuré Laurence Ferrari qui s’est aussi exprimée à titre personnel : «cette loi est très importante pour moi ainsi qu’à toutes les autres femmes. Et j’espère, très sincèrement, que ce droit acquis de haute lutte par nos mères et par nos aîné.es sera inscrit dans la Constitution».
Cnews et l’Arcom
Cnews, qui a l’habitude d’accommoder l’information aux convictions politiques de ses dirigeants est dans le viseur d’associations citoyennes qui demandent à l’Arcom de ne pas renouveler l’attribution d’un des 15 canaux de la TNT à cette chaîne.
Lire : APPEL À MOBILISATION CONTRE LE RENOUVELLEMENT DE L’AGRÉMENT DE CNEWS ET C8
Non seulement la chaîne a été épinglée pour de multiples propos haineux sexistes et racistes mais elle ne respecte pas l’équilibre des temps de paroles entre représentants de différents courants d’opinion. Les féministes et écologistes qui répondent favorablement à leurs invitations sont vite transformés en puching ball… Les excuses de Laurence Ferrari n’effacent pas le passif de désinformation de la chaîne.
(Si vous voulez voir la séquence de désinformation de Cnews (l’infographie chiffrée est à 3′)