En raison d’une action militante pour l’IVG en 2013, une ex-Femen avait été condamnée pour « exhibition sexuelle ». La CEDH estime que la France n’a pas respecté sa liberté d’expression.
Un communiqué de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) publié ce jeudi annonce que « la peine d’emprisonnement avec sursis infligée à une militante des Femen pour exhibition sexuelle dans une église est contraire à l’article 10 de la Convention. »
Ex-militante Femen, Éloïse Bouton avait été condamnée à un mois de prison avec sursis pour « exhibition sexuelle » après avoir mimé un avortement dans l’église de la Madeleine, à Paris en 2013. (Elle a depuis quitté le mouvement Femen.)
Elle avait agi, en dehors de tout office religieux, « en se présentant devant l’autel, la poitrine dénudée et le corps couvert de slogans » rappelle la CEDH
À cette occasion, elle « mima, à l’aide d’un morceau de foie de bœuf, un avortement. Sa performance fut brève et elle quitta les lieux à l’invitation du maître de chapelle présent. Cette action fut médiatisée, une dizaine de journalistes étant présents », poursuit la cour. Qui décrit son action comme une « performance » visant à dénoncer la position de l’Eglise Catholique sur l’avortement.
Le curé de la paroisse avait déposé plainte et Éloïse Bouton a été condamnée à un mois de prison avec sursis en première instance, en appel et en cassation par les tribunaux français.
La CEDH, « rappelle tout d’abord qu’une peine de prison infligée dans le cadre d’un débat politique ou d’intérêt général n’est compatible avec la liberté d’expression garantie par l’article 10 de la Convention que dans des circonstances exceptionnelles, par exemple, la diffusion d’un discours de haine ou d’incitation à la violence. En l’espèce, l’action de la requérante à laquelle aucun comportement injurieux ou haineux n’a été reproché, avait pour seul objectif de contribuer au débat public sur les droits des femmes ».
La Cour note encore que les juridictions françaises se sont « bornées à examiner la question de la nudité de sa poitrine dans un lieu de culte, sans prendre en considération le sens donné à sa performance ni les explications fournies sur le sens donné à leur nudité par les militantes des Femen ».
La CEDH conclut que les tribunaux français « n’ont pas procédé à la mise en balance entre les intérêts en présence de manière adéquate et que l’ingérence dans la liberté d’expression de la requérante que constitue la peine d’emprisonnement avec sursis qui a été prononcée à son encontre n’était pas nécessaire dans une société démocratique ». La France a donc violé l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme relative à la liberté d’expression.
La CEDH a condamné Paris à verser 2000 euros à Eloïse Bouton, pour dommage moral, et 7800 euros pour frais et dépens.
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