Elles continueraient de travailler plus pour gagner moins que les hommes : en proposant d’augmenter le plafond d’heures supplémentaires défiscalisées, le législateur ignore l’impact d’une telle mesure sur l’égalité des sexes.
L’aile droite de la majorité présidentielle vient d’introduire dans le projet de loi « Pouvoir d’achat » une disposition visant à augmenter le plafond d’heures supplémentaires défiscalisées (pour le faire passer de 5 000 à 7 500 euros par an). Nouvel avatar du « travailler plus pour gagner plus ».
Le législateur a-t-il fait une étude d’impact de cette mesure sur l’égalité femmes-hommes ? Manifestement non. Alors le Haut conseil à l’égalité, (HCE) le met sur la voie : « nous savons déjà que les dispositions actuelles bénéficient davantage aux hommes. Parmi les salarié.es effectuant des heures supplémentaires, 57% des hommes effectuent en moyenne 126 heures et seulement 39% des femmes en effectuent en moyenne 84. Le HCE rappelle des éléments de son rapport sur le sexisme : « les charges familiales pèsent hélas encore largement sur les femmes. Elles sont donc moins disponibles pour « travailler plus pour gagner plus », alors que ce sont elles qui ont les plus faibles revenus et sont à ce titre souvent déjà non imposables. »
Le système de domination masculine économique est bien huilé. Travailler plus pour gagner moins que les hommes, les femmes le font depuis bien longtemps. Elles cumulent leur activité (peu) rémunératrice et le travail gratuit fait à la maison car la société les enjoint de prendre en charge ce travail. En outre, les métiers vers lesquels les femmes sont orientées sont les moins rémunérateurs. Et l’organisation politique ne fait rien pour que le travail domestique et familial soit allégé pour les femmes. En défiscalisant les heures supplémentaires, qui sont majoritairement accordées aux hommes, l’Etat se prive de ressources qui pourraient servir à créer des places en crèche par exemple… Et c’est « tout bénef » pour les hommes qui travaillent un peu plus et gagnent beaucoup plus.
C’est pourquoi le HCE appelle le législateur à réfléchir autrement. Et, sur cette question précise des heures supplémentaires « le HCE estime que des mesures d’accompagnement seraient nécessaires pour libérer celles sur qui pèsent les contraintes d’horaires, essentiellement la mise en place d’un véritable service public de la petite enfance : création massive de nouvelles places de crèche, élargissement de la durée d’ouverture des crèches et des systèmes de garde d’enfant, augmentation du montant des diverses aides pour garde d’enfants, incitation à la création de garderies dans les entreprises.»
Et « le HCE alerte sur le fait que, faute de mesures supplémentaires, les femmes n’auront pas de liberté de choix. La grande cause du quinquennat passe par l’égalité réelle des droits. »
Voilà qui rappelle un débat maintes fois esquivé par les décideurs politiques sur la déconjugalisation de l‘impôt ou l’imposition des pensions alimentaires (qui sont déduites des revenus imposables des pères mais ajoutées à ceux des mères…)
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