Elles et ils refusent les « jobs destructeurs » de l’agro-industrie et l’ont dit lors de la remise de leurs diplômes d’AgroParisTech. La vidéo de leur discours puissant est acclamée.
Loin de se réjouir de partir vers de grandes carrières professionnelles, huit jeunes, fraîchement diplômé.es, d’AgroParisTech ont appelé à déserter les métiers qui s’offrent à eux, lors de la cérémonie qui devait célébrer leur formation. « Une formation qui pousse globalement à participer aux ravages sociaux et écologiques en cours » attaque la première intervenante. Elles et ils ne veulent pas de « ces jobs [qui] sont destructeurs. Les accepter c’est nuire en servant les intérêts de quelques-uns. »
Leur combat conjugue écologie et social : « Nous ne croyons ni au développement durable, ni à la croissance verte ni à la « transition écologique », une expression qui sous-entend que la société pourra devenir soutenable sans qu’on se débarrasse de l’ordre social dominant. »
Elles et ils refusent de « Trafiquer en labo des plantes pour des multinationales qui asservissent toujours plus les agricultrices et les agriculteurs. Concevoir des plats préparés et des chimiothérapies pour soigner ensuite les malades causé.es. Inventer des labels « bonne conscience » pour permettre aux cadres de se croire héroïques en mangeant mieux que les autres. Développer des énergies dites « vertes » qui permettent d’accélérer la numérisation de la société tout en polluant et en exploitant à l’autre bout du monde… » et la liste est longue dans ce puissant discours à huit voix de 7’30 (vidéo YouTube ci-dessous).
Ils appellent à suivre d’autres voies. Des voies tracées par des ingénieurs agronomes considérés comme hétérodoxes jusqu’ici. Notamment Lidya et Claude Bourguignon qui s’exprimaient dans le film de Coline Serreau que nous avions rencontrée en 2010 (lire : SOLUTIONS LOCALES POUR UN DÉSORDRE GLOBAL, COLINE SERREAU FILME LA RÉSISTANCE À LA CRISE ÉCOLOGIQUE)
Mais les jeunes diplômé.es semblent être davantage entendu.es et sont aujourd’hui moins isolé.es que leurs ainé.es. Sur les réseaux sociaux, la vidéo de leur discours, postée le 10 mai, fait déjà un tabac. Bien sûr, certains leur reprochent de cracher dans la soupe, d’être des enfants gâtés ou de ne rien comprendre et buttent sur cette phrase de leur discours « nous pensons que l’innovation technologique ne sauvera rien d’autre que le capitalisme ».
Mais une majorité applaudit et partage la vidéo. Camille Etienne, la jeune activiste pour la justice sociale et climatique, qui a co-signé une tribune pour appeler le futur gouvernement à suivre une formation de 20 heures sur les enjeux écologiques (publiée dans le JDD le 8 mai dernier), parle d’« un des discours les plus forts que j’ai pu voir ces derniers temps.»
A gauche, Jean-Luc Mélenchon ou François Ruffin ont été parmi les premiers à applaudir. Pierre Larrouturou, l’Eurodéputé Nouvelle Donne écrit sur Twitter : « je suis un ancien de l’Agro et je suis fier (ou triste ?) d’entendre ces étudiants appeler à un changement radical de nos modes de vie. Prenez 3 minutes pour les écouter ».
Et c’est une avalanche d’applaudissements sur les réseaux sociaux ou en commentaires de la video de la part de personnes qui disent parfois « en avoir les larmes aux yeux ».
Jacques Attali, écrivain qui a conseillé plusieurs présidents de la République, reprend les paroles du texte de Boris Vian. « Je ne suis pas sur terre Pour tuer des pauvres gens C’est pas pour vous fâcher Il faut que je vous dise Ma décision est prise Je m’en vais déserter » approuvant ainsi ces jeunes qui veulent déserter un système qui détruit.