A l’occasion d’un rapprochement entre les plus grandes écoles, une tribune 100 % masculine affiche son contentement. Une image qui n’a rien d’exceptionnel.
La semaine dernière, HEC Paris et les cinq Écoles fondatrices de l’Institut Polytechnique de Paris (École polytechnique, ENSTA ParisTech, ENSAE ParisTech, Télécom ParisTech et Télécom SudParis) ont signé une convention prévoyant la création d’une école doctorale commune afin de proposer de nouvelles offres de formation et de permettre l’émergence de start-ups.
Lors de la conférence de présentation de ce beau projet, les directeurs de ces institutions se sont assis à une tribune : huit hommes contents d’eux. Pas une femme ! HEC, Polytechnique et consorts ont annoncé la nouvelle sur Twitter.
Et lorsque le Le Figaro Etudiant a posté un article consacré à cette initiative, le réseau social s’est enflammé. Même Jacques Attali s’en est ému :
La professeure de lettres Françoise Cahen a tenu à souligner que le cas HEC Polytechnique n’est pas isolé. Même dans les études de lettres qui comptent pourtant de très nombreuses femmes parmi les enseignants, les décideurs de ce qui doit être enseigné et couronné de succès restent entre hommes. Elle cite la cérémonie des docteurs de l’Université Panthéon-Sorbonne et un séminaire national des lettres
Malgré les multiples interpellations sur les réseaux sociaux, aucune réaction des intéressés. Chacun pourrait dire qu’il n’y est pour rien, qu’il est là en tant que dirigeant d’une école en particulier, pas sa faute si les autres sont aussi des hommes. Mais ce genre d’excuse n’est plus à la mode, mieux vaut ne rien dire.
Continuum
Depuis que les femmes ont la possibilité de s’indigner sur les réseaux sociaux, il n’est plus possible de passer sous silence cet entre soi masculin. C’est collectivement qu’il faut prendre le problème à bras le corps. Sans démarches volontaristes, ou lois contraignantes, pas de parité. Parfois on progresse, parfois on stagne. L’enseignement est un métier très féminisé mais les hautes sphères ont toujours été très masculines jusqu’à ce qu’en 2016, la ministre de l’Education de l’époque, Najat Vallaud-Belkacem, qui avait auparavant été ministre des Droits des femmes, fasse en sorte que les nominations de nouveaux rectrices et recteurs d’académie aboutissent à une stricte parité : 15 femmes et 15 hommes. Ceci en se conformant à la loi sur les nominations équilibrées dans la haute fonction publique adoptée le 12 mars 2012.
L’enseignement supérieur et la recherche en revanche, ont du mal à évoluer. Malgré une loi du 22 juillet 2013 prévoyant que les femmes et les hommes participent ensemble à la gouvernance des établissements d’enseignement supérieur, le 8 mars 2018, la Conférence des présidents d’universités (CPU) constatait : « on compte seulement 10 femmes présidentes d’université pour 71 universités en France. » Et le Conseil d’administration de la CPU ne compte que quatre femmes sur 18 membres.
Du côté des grandes écoles, il semblerait que les hautes instances laissent passer le mini-orage sur les réseaux sociaux sans bouger un cil. La parité n’est pas une priorité pour elles. Ou alors en faveur des garçons. Dans certains jurys des concours d’entrée, des consignes sont données pour faire entrer davantage de garçons pour une raison triviale : les écoles sont classées en fonction du salaire d’entrée dans la vie active de leurs élèves. Et comme les filles gagnent moins, si ces écoles ont trop de filles elles dégringolent dans les classements. Ce qu’on appelle le continuum des inégalités.
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