« Le compte n’y est toujours pas ! » Un nouveau rapport de la Fondation des femmes note une très légère augmentation de moyens mais il faudrait que l’Etat multiplie par 15 à 30 le budget destiné à endiguer le fléau des violences misogynes.
« Où est l’argent contre les violences faites aux femmes ? » demande encore la Fondation des femmes dans un nouveau rapport. « ‘Où est l’argent ?’ est un cri qui ne pose pas seulement la question des financements mais aussi celui du niveau de priorité qu’une société accorde aux femmes et à leurs droits. Combien faudra-t-il de mortes et de vies brisées pour qu’enfin notre société fasse droit ? » demande Anne-Cécile Mailfert, la présidente de la Fondation des femmes.
Ce rapport a beau aller chercher dans tous les recoins du budget de l’Etat chaque dépense pour lutter contre les violences faites aux femmes… « Le compte n’y est toujours pas ! »
Il faudrait que l’Etat consacre, au bas mot, 2,6 milliards d’euros « à la protection des victimes de violences conjugales, sexistes et sexuelles en France ». Et il en consacre seulement 184,4 (soit 0,04 % du budget de l’Etat). Certes, ce chiffre n’était que de 134,7 millions d’euros en 2018, soit une augmentation de 50 millions d’euros en cinq ans. Mais c’est très, très loin du compte.
Pire : le budget moyen par femme victime de violences conjugales est en baisse de 26 %. Car la vague #MeToo et les appels à libérer la parole des victimes ont provoqué une explosion des demandes d’aide : +83% pour les violences conjugales entre 2018 et 2022 et +100% pour les violences sexuelles ces 10 dernières années. Les moyens alloués à l’aide aux victimes étaient faibles, mais avec l’augmentation du nombre de victimes demandant de l’aide, la situation se détériore.
Si le gouvernement a beaucoup communiqué et un peu augmenté le budget consacré à la lutte contre les violences conjugales, les violences sexuelles sont semble-t-il passées encore plus en dessous des radars. Le budget dédié aux violences conjugales -171,7 millions d’euros- est qualifié de « goutte d’eau par rapport aux besoins ». Celui dédié aux politiques de lutte contre les violences sexuelles -12,7 millions -est « quasi inexistant.»
Multiplier par 15 à 30 les budgets dédiés à la protection des victimes de violences conjugales, sexistes et sexuelles en France
Quand le rapport estime à 2,6 milliards d’euros le budget nécessaire à la protection des femmes, c’est l’estimation la plus basse. Il ne compte que les victimes qui portent plainte. Mais si l’on retient celles qui ne portent pas plainte, les femmes repérées dans les enquêtes de victimation c’est un budget de 5,4 milliards d’euros qui est nécessaire. Soit entre 2,3 milliards et 3,2 milliards d’euros pour lutter contre les violences conjugales. Et entre 344 millions et 2,2 milliards d’euros pour lutter contre les violences sexuelles qui se produisent en dehors du couple. Il faudrait multiplier les budgetspar 15 à 30.
Le rapport ne manque pas d’idées à soumettre au gouvernement et identifie cinq priorités d’action : « le renforcement de l’effort de lutte contre les violences sexuelles, l’augmentation du soutien financier aux dispositifs d’accueil, d’orientation et d’accompagnement des victimes, le remboursement à 100 % des consultations en psycho-traumatologie et l’augmentation des places d’hébergement des femmes victimes de violences. » Le rapport indique qu’il faudrait près de 5 000 enquêteur.rice.s et plus de 600 magistrat.e.s spécialisé.e.s aux faits de violences sexistes et sexuelles pour améliorer la situation.
Face aux besoins qui deviennent enfin visibles depuis #MeToo, la trop faible action de l’Etat paraît elle aussi de plus en plus visible. Au début du mois, la Fondation des femmes lançait même un appel à dons pour sauver des associations d’aide aux victimes menacées de faillite. Mais c’est à l’Etat d’agir !
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