Un rapport de la Cour des comptes européenne et Oxfam appellent à un autre genre de gouvernance : pas de budget pour les projets contrariant l’égalité des sexes et un plan de relance féministe !
Combien d’appels faudra-t-il ? À l’approche du Forum Génération Égalité, de nouveaux appels à une politique économique féministe tentent de se faire entendre. Le titre du rapport publié le 26 mai dernier par la Cour des comptes européenne, sent l’impatience : « Intégration de la dimension de genre dans le budget de l’UE : il est temps de joindre l’acte à la parole ».
Ce rapport dresse un bilan (très maigre) du « gender mainstreaming » traduit en français par « approche intégrée de la dimension de genre » sur la période allant de 2014 à 2019. Puis il appelle la Commission européenne à concrétiser ses engagements, c’est-à-dire « promouvoir systématiquement et activement l’égalité entre les femmes et les hommes lors de l’élaboration des politiques et de l’exécution du budget de l’UE ». Et précise : « La budgétisation sensible au genre ne se limite pas à financer des initiatives explicitement consacrées à l’égalité hommes-femmes. Elle consiste à comprendre l’impact des décisions budgétaires et politiques sur les objectifs d’égalité entre les sexes et à s’appuyer sur ces informations pour compenser les inégalités en introduisant des changements dans les dépenses et les recettes publiques. »
Qu’a fait la commission européenne depuis 2014 ? Pas grand-chose. Sur les 58 programmes de dépenses de 2014-2020, seuls quatre comportaient des objectifs explicitement liés au genre, et cinq seulement étaient pourvus d’indicateurs liés au genre» dit le rapport qui appelle à évaluer la prise en compte de l’égalité des genres dans le plan de relance, dont 37% des mesures sont dédiés à l’environnement et 20% au numérique… Mais l’égalité de genre n’y est associée à aucun objectif chiffré.
L’égalité = + 10 % de PIB
Ce rapport européen démontre une nouvelle fois qu’investir dans l’égalité des genres est bon pour l’économie. Au lieu de prôner la rigueur budgétaire qui va conduire à fermer des crèches et à sortir de nombreuses femmes du marché de l’emploi par exemple, il faudrait augmenter les dépenses publiques de garde d’enfants, ce qui permet à davantage de femmes de travailler, augmente le PIB et renfloue les caisses de diverses cotisations sociales. Selon la Cour des comptes européenne, améliorer la politique d’égalité de genres permettrait la création de 6,3 à 10,50 millions d’emplois supplémentaires en 2050 et une augmentation du PIB de l’Union Européenne de l’ordre de 10%.
Pas d’objectif féministe, pas d’argent public !
A travers une campagne et une pétition, l’ONG Oxfam France appelle à nouveau à une politique budgétaire féministe et, de toute urgence,à un plan de relance féministe. L’ONG dirigée en France par l’ex-ministre Cécile Duflot le rappelle : « en seulement une année, nous avons perdu plus de 30 ans pour atteindre l’égalité femmes-hommes. Et elle n’était déjà pas pour demain…» Les femmes étaient beaucoup plus nombreuses que les hommes en première ligne dans la lutte contre la pandémie mais ce sont elles qui ont le plus perdu. Oxfam aligne les chiffres : dans le monde entier, elles ont subi une perte de revenus d’au moins 800 milliards de dollars en 2020, du fait de la crise, soit le PIB combiné de 98 pays. 64 millions de femmes ont perdu leur emploi dans le monde, 47 millions de femmes ont basculé sous le seuil d’extrême pauvreté en 2020. En France, 1 femme sur 3 a vu son activité professionnelle s’arrêter.
Et pourtant, les politiques volontaristes mises en place pour sortir de la crise ignorent cette vision genrée de leur politique. En France, sur les 35 milliards du plan de relance, 7 milliards seulement sont dédiés à des emplois considérés comme féminins. Oxfam exprime plusieurs demandes pour une politique féministe.
Promouvoir des politiques publiques qui déchargent les femmes du travail domestique : congés parentaux partagés, service public de la petite enfance, sensibilisation pour un partage plus égalitaire des tâches au sein des foyers.
Corriger les inégalités entre les femmes et les hommes dans le monde du travail : revaloriser les métiers à prédominance féminine, promouvoir des femmes à la tête des entreprises, conditionner les aides publiques à l’égalité femmes-hommes.
Appliquer la budgétisation féministe aux plans de relance : pas d’argent public pour les projets qui n’améliorent pas l’égalité.
Adopter une solidarité internationale féministe en augmentant les financements en faveur de l’égalité femmes-hommes et permettant de soutenir les mouvements et organisations féministes des pays en développement.
Une campagne, d’Oxfam France porte la voix de femmes qui « font bouger les lignes et incarnent les combats pour les droits des femmes. Des femmes d’âges et d’horizons différents, dont la vie, les métiers et les convictions les ont portées à défendre des mesures concrètes pour réduire les inégalités. » Comme Eva Sadoun, présidente et fondatrice de Lita.co, Marie Basile Mbarga, auxiliaire de vie chez Logivitae quise bat pour une juste revalorisation de son métier essentiel, Caroline De Haas, militante féministe et fondatrice du collectif #NousToutes, Amandine Hancewicz, autrice et consultante, Claire Tran, actrice, qui a cofondé l’association Parents & Féministes…
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