Aujourd’hui, la science l’affirme : l’ovule est l’élément actif lors de la fécondation, et non les spermatozoïdes comme on l’a longtemps cru. Une observation qui rompt avec une représentation passive de l’appareil reproductif des femmes.

Souvenez-vous du générique du film Allô maman, ici bébé (1989) avec John Travolta : une horde de spermatozoïdes lancés à toute allure dans une course effrénée vers l’ovule — passif, bien sûr ! Dans la culture populaire, cette représentation des spermatozoïdes actifs et d’un ovule passif, en attente d’être fécondé, a encore la peau dure.
Pourtant, les recherches scientifiques ont depuis bien longtemps contredit cette théorie. Elles insistent sur le rôle déterminant de l’ovule dans la sélection des spermatozoïdes. Un changement de paradigme qui met fin à une vision arriérée du corps des femmes, perçu comme simple réceptacle de la semence masculine.
L’ovule mène la danse
C’est seulement à partir des années 80 que des premières études remettent en cause la théorie du sperme actif et de l’ovule passif. Ces recherches affirment que, chez les mammifères, l’ovule est l’élément actif dans le processus de fécondation. Cela s’explique par les sécrétions reproductives du corps féminin, notamment la composition de la couche externe de l’ovocyte, appelée la zone pellucide, qui opère comme un tri chimique parmi les spermatozoïdes, en les « testant » puis en sélectionnant les plus susceptibles de donner la vie, comme le détaille un article du magazine Live Science.
Cette capacité de l’ovule à « choisir » les spermatozoïdes est le produit de l’évolution. Dans ce même article, l’anthropologue biologique Lynnette Sievert, professeur à l’université du Massachusetts, à Amherst, explique que le corps féminin produit tous ses ovocytes en une seule fois, ce qui lui permet de les mettre à l’épreuve, en interne, pour n’en garder qu’un à la fois. Cette évolution différencie les mammifères femelles des poissons, des amphibiens et des reptiles, où la fécondation se déroule de manière externe. Par exemple : les femelles poissons et grenouilles expulsent une masse d’œufs dans l’eau et les mâles déposent ensuite leurs spermatozoïdes en direction des œufs, détaille l’article. Une méthode de reproduction plus ancienne sur laquelle les hommes s’alignent encore en produisant un maximum de spermatozoïdes à chaque fois, qu’ils expulsent ensuite.
« J’ai réalisé que l’image de l’ovule et du spermatozoïde que l’on trouve dans les ouvrages populaires et scientifiques sur la biologie de la reproduction repose sur des stéréotypes qui sont au cœur de nos définitions culturelles de l’homme et de la femme », écrivait l’anthropologue américaine Emily Martin dans un article paru en 1991.
Les effets des biais sexistes dans la science
La science a longtemps été le miroir des dynamiques de domination dans notre société. Les femmes sont sous-représentées dans les essais cliniques. Résultat : leurs spécificités physiologiques restent encore méconnues. L’ampleur de l’endométriose commence tout juste à être mesurée. Des médicaments, comme le spasfon, vendus comme soulageant les douleurs menstruelles ou maux de ventre, ont été massivement prescrits aux femmes malgré le cruel manque de données scientifiques qui permettraient de prouver leur efficacité. Les laboratoires ont engagé davantage de recherches sur la contraception féminine, en délaissant totalement son pendant masculin. Pourtant, en moyenne, vingt femmes décèdent encore chaque année en France du fait de leur contraception et 2500 accidents thromboemboliques liés à la prise hormonale sont recensés par l’Agence nationale de sécurité du médicament.
Si les stéréotypes sexistes ont longtemps influencé la recherche, et certains persistent encore, la connaissance scientifique du corps humain, notamment des femmes, progresse. Reste à savoir quand la culture populaire basculera elle aussi dans ce nouveau paradigme.
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